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d’agression qui avait déchaîné la guerre universelle ; elles étaient de deux sortes : les unes avaient trait aux effectifs, au recrutement des troupes, à leur instruction militaire, à leur encadrement ; les autres concernaient l’armement, les munitions, le matériel. La réduction de l’armée allemande au chiffre de cent mille hommes devait, d’après l’article 160, être terminée le 31 mars 1920 ; elle ne le sera pas le 31 mars 1921. L’Allemagne devait détruire ou livrer ses avions, ses canons, ses fusils, ses mitrailleuses, et n’en conserver qu’un nombre strictement déterminé. Elle en garde beaucoup plus qu’elle n’en a le droit. A Spa et à Paris, les Alliés ont prolongé les délais fixés au Traité et fait au Reich des concessions dont il s’est empressé de nous témoigner sa reconnaissance, suivant la méthode la plus ordinaire, c’est-à-dire en nous demandant de nouveaux bienfaits.

La responsabilité de l’Allemagne dans le déchaînement de la guerre avait été proclamée dans le préambule du traité de paix, ainsi que dans l’article 231 relatif aux dommages, et nos amis Anglais avaient demandé que cette responsabilité fût sanctionnée par la mise en accusation de l’ex-empereur Guillaume pour « offense suprême contre la morale internationale et l’autorité sacrée des traités. » L’article 257 avait donc prévu qu’un tribunal spécial, composé de cinq juges désignés par la Grande Bretagne, les États-Unis, la France, l’Italie et le Japon, serait constitué to try the accused. La Hollande ayant refusé l’extradition, les Alliés n’ont pas insisté. Ils n’ont pas songé davantage à intenter un procès par contumace. Ils ont consenti, de bonne grâce, à tenir l’article 231 pour lettre morte.

L’article 228 stipulait que l’Allemagne devait livrer aux Alliés, en vue d’une mise en jugement devant les tribunaux militaires, ceux de ses ressortissants qui auraient commis, au cours des hostilités, des actes contraires aux lois et aux coutumes de la guerre. La Conférence de la paix avait minutieusement classé sous trente-deux rubriques distinctes les crimes perpétrés par les officiers et les soldats allemands : massacres et déportations de civils, mise à mort d’otages, viols, pillages, confiscations, contributions illicites, emploi de gaz toxiques, empoisonnement des puits, destruction des propriétés publiques et privées, incendie de villes ouvertes et de villages, bombardement d’ambulances, etc. ; liste sinistre, écrivait M. Léon Bourgeois dans son rapport au Sénat sur le traité de paix, « liste sinistre et telle que l’humanité n’a rien connu de semblable en dehors des invasions des Barbares ou des guerres d’extermination de l’antiquité. » Dès le 25 janvier 1920, c’est-à-dire quelques jours à peine après la