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ouvrières et, si étrange qu’il puisse paraître de les ranger parmi les forces internationales, les États-Unis d’Amérique.

La plus ancienne et la plus haute des grandes personnalités morales supranationales, la Papauté, demeure, après la guerre, la plus respectée et la plus écoutée. Les événements, à l’insu des hommes et parfois contre leur volonté, ont travaillé pour elle. On ne peut plus douter que, de la catastrophe des trois grands empires d’Europe, il résulte un bénéfice pour le catholicisme. Il est une force vivante qui se développe vigoureusement dans la liberté, mais que l’oppression ou une protection intéressée et maladroite étouffent également. Tôt ou tard, quand un régime d’ordre se sera établi en Russie, l’influence catholique ne manquera pas de tirer avantage du rôle effacé que l’Eglise orthodoxe a joué dans la grande crise révolutionnaire. Qui sait si l’âme russe, si imprégnée de christianisme, ne se tournera pas un jour, après ses dures épreuves, vers la grande force chrétienne vivante et agissante ? L’Ukraine, si elle réussit à développer son autonomie, verra le catholicisme, sous sa forme uniate, étendre son domaine. Si la Lettonie est en majorité protestante, la Lithuanie est en grande majorité catholique. Enfin tout le monde sait que la Pologne ressuscitée représente une nouvelle Puissance catholique et chacun devine que ce n’est peut-être pas l’une des moindres raisons de l’acharnement de quelques-uns de ses adversaires.

L’Empire allemand, quoiqu’un tiers de ses habitants fussent catholiques, demeurait un empire officiellement protestant dont Guillaume II était le summus episcopus. Dans la catastrophe de l’Empire et de l’ancien ordre de choses, le Centre est resté le parti le mieux organisé, le plus solide, le plus cohérent ; aucun Gouvernement n’est possible sans lui et il partage, depuis la révolution, les responsabilités du pouvoir avec les « social-démocrates ; » lui seul a un programme social qui tende, sans révolution, à une reconstruction.

L’Autriche-Hongrie était un empire officiellement catholique, mais, selon la tradition joséphiste, l’Église y était au service de l’État, et comme l’État était germanisateur en Autriche et magyarisateur en Hongrie, l’Église, elle aussi, était germanisatrice et magyarisatrice ; elle recueillait sa bonne part des haines que les nationalités opprimées portaient à l’État oppresseur. Durant la guerre, la diplomatie du Saint-Siège travailla à