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aussi rapetisser la politique du Saint-Siège en la rabaissant à des intérêts personnels, et en faisant ainsi d’une œuvre de conciliation et de paix un élément nouveau de conflit.

Je crus opportun de signaler cette erreur de tactique à certains catholiques, car elle fut la cause d’une longue défiance de la part des républicains, même modérés, qui à certains moments non seulement ne se montrèrent point disposés à favoriser la politique du Saint-Siège, mais firent cause commune avec les radicaux pour la combattre. Comment peut-on espérer être bien reçu dans la maison d’un individu que l’on menace ouvertement de mettre à la porte dès que l’on sera entré ? Dans toutes nos conversations avec des hommes du gouvernement, j’eus soin, afin de dissiper ces craintes, de bien déclarer que l’unique but du Saint-Siège était d’arriver à la pacification religieuse, et qu’il attendait ce résultat de leur bonne volonté et de leur sagesse, qu’il n’en faisait point une question de personnes, mais de principes et d’intérêts supérieurs.


Les incidents se multiplièrent. Ils attestèrent la souple fermeté du nonce, toujours préoccupé d’expliquer au gouvernement certains non possumus formulés par la conscience catholique, et de faire constater aux catholiques, évêques et fidèles, que les hommes d’Etat, eux aussi, quelle que fût parfois leur bonne volonté, pouvaient se sentir acculés par les exigences de leur majorité parlementaire à d’autres non possumus, qui pour être moins augustes n’étaient pas moins impérieux. Et c’est en s’attachant tout d’abord à l’impartiale observation de toutes les impossibilités, que Mgr Ferrata se rendait capable de découvrir, peu à peu, les possibilités d’entente, et même de les créer.

Le pénible épisode auquel donnèrent lieu la bagarre romaine du Panthéon et le « tempérament impulsif » de Mgr Gouthe-Soulard, eût été très opportunément abrégé si l’archevêque eût accepté la solution concertée entre le nonce et M. Ribot, et approuvée par les cardinaux Foulon et Richard, et s’il eût voulu déclarer que dans sa lettre à M. Fallières il n’avait eu « aucune intention d’offenser la délicatesse et l’honneur de M. le ministre des Cultes. » Du moins, Mgr Ferrata connut-il la joie tardive de pouvoir convaincre les métropolitains de France, au lendemain de la condamnation de l’archevêque d’Aix, que les adresses de sympathie déjà expédiées au prélat par l’épiscopat n’avaient pas besoin d’être complétées par une nouvelle série de manifestations. Que de nuages durent s’accumuler devant le regard du représentant pontifical à la suite d’une certaine visite qu’il reçut