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Mais on voit la renommée de Mme de La Fayette. Ce n’est pas assez dire, qu’elle est pure : elle est quasi injurieuse pour le mari de cette dame qui a deux enfants néanmoins. Et Huet ne craint pas de l’appeler « la grande vestale, » assez drôlement, le jour qu’il est furieux de ses conseils.

La consultation qu’il a faite, il l’a oubliée assez vite. Et il partage son temps, avoue-t-il ou proclame-t-il, entre Origène et celle qu’il décrit, selon le rondeau bien connu :


Elle a beau teint, le parler de beau zèle,
Et le tetin plus rond qu’une groiselle.


Va-t-on le blâmer ? « Je fais, répond-il, mon possible pour me dégager. Je ne sais pas si j’y réussirai ; mais j’éprouve que... » Et, chastement, le reste de la lettre manque.

Au mois d’octobre de cette année 1661, Mme de La Fayette fut très malade. Elle eut la dysenterie. A ce moment, M. Huet n’allait pas bien. M. Ménage avait la fièvre et, amicalement, disait qu’il était donc malade de trois maladies à la fois. M. Ménage et M. Huet furent bientôt guéris : non Mme de La Fayette. La dysenterie céda ; mais survint la fièvre. Le 9 octobre, Mme de Sévigné écrivait à Ménage : « Je vous avoue que je suis fort en peine de la santé de notre chère amie et qu’après tant d’autres maux je ne comprends pas qu’elle ait la force de supporter celui qu’elle a présentement. Vous me faites espérer pourtant qu’elle en sortira bientôt, et je le crois ; car, sans cette espérance, quoi que vous disiez de mon amitié, je vous assure que je ne serais pas consolable. » Ménage avait tort de mettre en doute l’amitié de Mme de Sévigné pour Mme de La Fayette. Mais il avait raison de la croire consolable, parce qu’elle avait plus d’entrain qu’il n’en faut pour survivre.

En 1662, chacun son tour, ce fut à Ménage de faire des sottises. Il s’éprit d’une jeune fille qu’il a chantée sous le nom de Chloé. C’est la première infidélité qu’il ait faite à Laverna : et c’est à ce moment qu’il dit qu’il est si occupé à recueillir les louanges de M. le Cardinal qu’il néglige le latin de son amie. Cette passion pour Chloé dura quelque temps, avec des hauts et des bas de ferveur. Le 13 octobre, Huet lui écrit : « Soyez le bien revenu de tous vos pèlerinages et de votre amour pour Chloé. Je ne m’étonnerais pas trop qu’après avoir été huit jours auprès de Mme de La Fayette, car je ne connais point le mérite