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LETTRES
DE GRÈCE ET D’ITALIE
(1893)

II [1]


VI


Athènes, le 4 juin.

Je suis ici depuis ce soir, à l’hôtel de la Grande-Bretagne, sur la place du Palais-Royal, avec un beau balcon, en face de l’Acropole, à peu près exactement sur une ligne qui joint l’Académie au Stade. Platon a dû, très souvent, passer non loin d’ici. En face de moi, coupant la vue, un rocher, massive, pyramide aux parois à pic, au sommet nettement tronqué. Comme le soleil se couche exactement derrière lui, ce rocher se détache comme un écran bleu sur l’horizon, sur les montagnes, sur la mer, sur le ciel, noyés, fondus dans la lumière. Sur ce rocher dont le regard ne se détache plus, les trois grands vestiges : les deux faces du Parthénon séparées par l’irréparable brèche, et l’Erechteion, dont je ne vois d’ici que les légères colonnes sans distinguer les Cariatides. Mais ces immortels témoins de la beauté antique et de la barbarie contemporaine ont pris, sous le soleil que, lui, on n’a pu leur enlever, la teinte de l’or, et ce sont de vrais feux qu’ils jettent à cette heure flamboyante.

Et autour de ce centre, qui fascine la vue comme il absorbe

  1. Voyez la Revué' du 15 février.