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et des cœurs battant à l’unisson. Et ensuite une brassée de vos lettres : il était temps !

Voici mon emploi de la journée, tout sec cette fois, sans commentaires ni théories ; — je suis trop débordé pour « élucubrer. »

A l’hôtel de la Minerve, fenêtre sur la place, à deux pas du Panthéon, du palais Altieri et de la maison de mon ami L...

De dix heures à deux heures, à Saint-Pierre, un court salut, — puis, au Vatican, revoir les antiques seuls.

A deux heures, M. de Behaine, le cordial accueil d’autrefois ; puis, chez la princesse Altieri, une longue visite, très douce et très triste : la grande ruine des princes romains a passé par là ; dus évocations douloureuses, des larmes, une grande émotion. Que d’amertumes ont frappé cette maison ! L’exquise fille, la pauvre petite duchesse de Sora, morte il y a moins d’un an, un petit-fils Viano, il y a quinze jours. Le duc de Sora accablé, l’autre gendre, ce charmant comte de Ciciliano-Théodoli, la moitié du palais livré à la Cour de cassation italienne, le prince Altieri brisé par tant de coups, et toujours, malgré tout, le décor sauvé, la grande enfilade des salons, où les grands papes et les cardinaux vous regardent passer de leurs cadres, avant d’arriver au petit salon intime : le prince toujours immuable dans les fonctions d’apparat de chef héréditaire de la garde-noble papale, elle toujours forte, passionnée, vibrante, arrivant tout de suite comme jadis à causer politique et affaires.

L..., qui me traquait depuis trois heures, est venu m’y retrouver : voilà encore un cœur et un chaud : mais, mon Dieu ! évoque-t-il assez le Montfanon de Bourget ! En lisant Cosmopolis, j’avais cru, tant il était pareil, que c’était lui qui avait servi de modèle. Il parait que c’est un autre, mais cela prouve qu’ils sont deux, voilà tout.

De là à la Villa Médicis pour y revoir mes aimables compagnons de voyage de Smyrne, — puis au Pincio pour la traditionnelle promenade de 6 heures, le défilé des équipages, l’admirable coucher de soleil derrière Saint-Pierre ; revenu par Sainte-Marie Majeure et dîné à l’ambassade.

Henri Lorin y était, de passage à Rome comme par hasard, toujours intéressant, sortant de chez un cardinal, nous quittant pour aller chez un autre, préparant quelque nouvelle encyclique. J’y ai eu l’aubaine d’un quatrième convive, un jeune Normalien, M. Goyau, pensionnaire de l’école Farnèse, la