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LETTRES
DE GRÈCE ET D’ITALIE
(1893)

III[1]


X


À bord du Méduso. En rade de Corfou,

16 juin, 3 heures.

Une de ces douces heures où l’on se laisse vivre. Le bateau fait une escale de trois heures. Promenade en voiture le long de la belle vallée des Cannones, et me voici, sur le pont, attendant qu’on lève l’ancre, bien installé dans ma chaise, à l’arrière, à cinq cents mètres des deux rochers fortifiés entre lesquels la ville est nichée ; à l’arrière-plan, de l’autre côté du canal, le fond rose des hautes côtes d’Épire. Comment ne fait-il pas plus chaud, sous le ciel très bleu, très pur et ce soleil ? Mais non, une brise charmante qui n’atténue en rien pourtant l’éclatante lumière.

Voilà le bateau parti, et c’est très confortable de voir, de sa stalle d’orchestre, se dérouler comme un décor mouvant cette belle côte, si bien éclairée, dentelée, découpée, et dont les plans successifs, de tons de plus en plus vaporeux, mais toujours roses, s’étagent jusqu’à la grande montagne Kalamas. Sur le revers, c’est Janina. Voici l’embouchure du Kolamos, limite de l’Epire et de l’Albanie, et c’est très amusant de fouiller de la lorgnette

  1. Voyez la Revue des 15 février et 1er mars 1921.