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constate un manquement volontaire de l’Allemagne, il sera immédiatement procédé à la réoccupation de tout ou partie de ces zones. Mais l’article 18 de l’annexe II, relative aux réparations, est beaucoup plus large : « Les mesures que les Puissances alliées et associées auront le droit de prendre en cas de manquement volontaire par l’Allemagne et que l’Allemagne s’engage à ne pas considérer comme des actes d’hostilité peuvent comprendre des actes de prohibitions et de représailles économiques et financières et, en général, telles autres mesures que les Gouvernements respectifs pourront estimer nécessitées par les circonstances. » Les mots « telles autres mesures » laissent évidemment aux Alliés toute liberté de choix et la protestation du Reich ne résiste pas à la lecture de l’article. Mais, du moment où elle est formulée, nous ne devons pas commettre l’imprudence de la négliger. Le traité fournit déjà, par lui-même, prétexte à un assez grand nombre de discussions ; arrangeons-nous, du moins, pour que les protocoles subséquents ne recèlent pas de nouvelles causes de différends. M. Briand est certainement dans le vrai lorsqu’il dit que les sanctions dont les Alliés sont convenus à Paris rentrent dans le cadre du Traité ; mais, lorsque nous sommes exposés à voir le paiement de notre créance échelonné sur l’épouvantable espace de quarante-deux années, ce ne sont pas des garanties d’une heure que nous avons à établir. Si nous remettons à l’Allemagne, comme le comportent les accords de Paris, une forte partie de sa dette, nous ne ferons rien d’abusif ni d’exorbitant en exigeant, comme contrepartie, qu’elle reconnaisse, par un avenant explicite, la validité des sanctions que nous pouvons avoir, tôt ou tard, à lui appliquer. D’autre part, nous agirons sagement en ne laissant rien au hasard, même dans nos rapports avec nos alliés, pour la mise en œuvre de ces garanties. Depuis un an, l’occasion a perdu ses derniers cheveux. Prenons-la aujourd’hui par le cou.


RAYMOND POINCARÉ.


Le Directeur-Gérant :

RENÉ DOUMIC.