Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 62.djvu/225

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moment de l’entrée en vigueur du Traité. Ainsi, il y a contradiction flagrante entre la thèse française et la thèse allemande et, jusqu’ici, nos alliés n’ont même pas fait savoir publiquement s’ils adhéraient à notre opinion. A l’expiration des délais fixés par l’article 429, la France se trouvera donc dans un redoutable embarras, si nous ne dissipons pas, dès maintenant, ce malentendu. On nous a dit que nous n’avions pas à signifier les sanctions à l’Allemagne, parce qu’elles ne la regardaient pas ; mais, si elle en conteste la légalité, nous sommes bien obligés de lui répondre et de lui faire connaître notre volonté. Il ne suffit pas, d’ailleurs, que seuls nous répétions : « Les délais ne courent pas ; » il faut que nos alliés le répètent avec nous et que, tous ensemble, nous imposions à l’Allemagne notre interprétation. Autrement, nous nous payons de mots et nous renvoyons aux échéances de cinq, de dix et de quinze ans, des difficultés que le temps ne pourra qu’envenimer.

La seconde sanction dont il a été parlé à Paris est, comme on se le rappelle, ainsi libellée : « Il sera procédé à l’occupation d’une nouvelle partie du territoire allemand, que ce soit la Ruhr ou toute autre. » Ici encore, la note du Reich conteste le droit des Alliés : « D’après l’opinion officielle en Allemagne, nous dit-on, même l’article 18 de l’annexe II du traité de Versailles n’autorise pas l’extension de l’occupation à d’autres territoires allemands, car, en vertu de cet article, il ne peut être question que de représailles économiques. La question des garanties pour l’exécution du Traité de Versailles est réglée de la manière la plus complète par les articles 429 et 430 du Traité de paix. » Nous saisissons, dans ces quelques lignes, toute la perfidie de la manœuvre allemande. Chaque fois que nous abandonnons un des droits que nous confère le Traité, on nous demande plus que nous n’offrons ; chaque fois que nous invoquons le Traité, on nous dit qu’il est inexécutable ; chaque fois que nous voulons prendre une garantie, on nous objecte qu’elle n’est pas conforme au Traité. Ce malheureux Traité est donc, pour les Allemands, vivant ou mort, selon qu’il leur plaît de le ressusciter ou de le tuer. Là où il leur sert, il est inattaquable ; là où il les gêne, il n’est plus qu’un cadavre à jeter au charnier. Le raisonnement du Reich sur les articles 429 et 430 et sur l’article 18 de l’annexe II est, du reste, démenti par le texte et par l’esprit de ces clauses. L’article 429 prévoit l’évacuation des trois zones au bout de cinq, dix et quinze années, si les conditions du pacte sont fidèlement observées par l’Allemagne : l’article 430 porte que, si pendant ou après les quinze ans, la Commission des réparations