Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 62.djvu/196

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

encore que les Etats-Unis ne soient pas du nombre. Le sort d’une langue de terre de quelques kilomètres sur la côte d’Istrie apparaît sans aucune proportion avec les complications intérieures et internationales avec lesquelles l’Italie et ses alliées sont aux prises, a fortiori avec celles dont elles sont menacées, si elles n’arrivent pas à sortir de l’impasse. Le compromis proposé par M. Tittoni pour Fiume ne peut pas être séparé des circonstances qui l’ont inspiré, et pas davantage des engagements souscrits par les Alliés envers l’Italie pendant la guerre. Il est une transaction et comporte, de la part du gouvernement italien, la renonciation à la Dalmatie, libérant donc à cet égard la signature de la France et de l’Angleterre. L’équivalent, en somme modeste, qu’il assure à l’Italie (la jonction territoriale avec Fiume autonome), n’apparaît pas exagéré à qui l’apprécie par rapport à une renonciation si importante. Le refus de M. Wilson de reconnaître la Convention de Londres, donc de faire entrer en ligne de compte la renonciation à la Dalmatie, n’empêchera pas le peuple italien de tenir rigueur à la France et à l’Angleterre, si la paix ne lui apporte ni la Dalmatie, ni une satisfaction sur Fiume. Ces considérations, prépondérantes pour les Français et les Anglais, sont au contraire négligées délibérément par le gouvernement américain.

Quoi qu’il en soit, les négociations italo-américaines sont closes à la mi-novembre sur un échec. M. Tittoni, fatigué et découragé, remet, à peu de temps de là, le portefeuille des Affaires étrangères à M. Scialoja. Les élections législatives en Italie ont lieu sous le coup de déceptions réitérées, au milieu d’une agitation, dont la situation diplomatique n’est certes pas le seul facteur, mais est un des facteurs ; elles produisent une Chambre où l’équilibre des partis est littéralement bouleversé.