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prendre pour base générale de discussion. Mais il va plus loin.

Personnellement, il incline à attribuer Fiume-Ville à l’Italie, sans le territoire environnant, plutôt qu’à constituer ville et territoire en État libre. Et il le dit.

Cependant, M. Tittoni, après une visite à M. Lloyd George dans sa villégiature bretonne de Claire-Fontaine, renonce à soumettre à M. Wilson un projet reposant sur l’attribution à l’Italie de Fiume-Ville.

Aussi est-ce à peu de chose près le projet exposé par lui le 12 août que M. Tittoni soumet à Washington. Encore qu’il eût préféré, pour Fiume, une solution meilleure, M. Clemenceau s’empresse d’appuyer les propositions italiennes par un télégramme chaleureux à M. Wilson, insistant pour une réponse favorable et prompte. M. Lloyd George en fait autant.

Nous ne suivrons pas les négociations italo-américaines dans le dédale de notes et de contre-notes, à travers lequel elles vont se poursuivre jusqu’à la fin d’octobre 1919. Il nous suffira de relever un fait : chaque fois que le gouvernement italien, en répondant à M. Wilson, a formulé de nouvelles propositions, le gouvernement français, comme du reste le gouvernement anglais, les a appuyées à Washington de tout son pouvoir. Il en a été ainsi notamment en septembre 1919. Le président des Etats-Unis avait proposé la création, entre l’Istrie italienne et la Yougo-Slavie, d’un Etat-tampon de dimensions relativement vastes, avec Fiume pour capitale. M. Tittoni, pour éviter l’absorption de 40 000 Italiens dans un État comptant 200 000 Yougo-Slaves, était revenu à l’idée de M. Clemenceau d’attribuer à l’Italie Fiume-Ville, en pleine souveraineté. Le président du Conseil français a alors adressé à M-Wilson le 18 septembre une lettre animée du désir de faire obtenir à l’Italie la satisfaction demandée par son plénipotentiaire. Cette lettre ne pouvait, sous la forme déférente et amicale qui convient envers le chef d’un grand Etat ami, être plus pressante ni plus persuasive.

Ceux qui ont connu, en Italie, l’initiative prise par M. Clemenceau le 12 août et ses interventions auprès de M. Wilson, lui ont témoigné leur gratitude et en ont su gré à la France.

Mais le gouvernement italien n’a pas jugé opportun de donner à l’opinion publique des indications précises, par crainte de ranimer des espérances, sur la Réalisation desquelles