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n’en puis rien préciser. On a recommencé la publication de photographies sensationnelles, comme à chaque réunion du Conseil suprême. Puis, on a tiré le rideau, et on ne l’a plus guère soulevé que pour laisser passer, de temps en temps, un rayon de lanterne sourde. Nous savons, du moins, avec quelque précision, dans quelles dispositions générales M. Briand a abordé l’examen des nombreuses questions qui se pressent à l’ordre du jour. Avant de recourir à la force vis avis de l’Allemagne, il veut, a-t-il dit, épuiser tous les moyens de conciliation et toutes les ressources du raisonnement. Parfait. Où sont les insensés qui rêvent d’employer la force sans nécessité? J’entends bien que, ces temps derniers, dans les couloirs des Chambres et dans une partie de la presse, on a essayé, pour semer la panique, de dresser quelques épouvantails. On a dénoncé les fous qui nous conduisaient à la mobilisation de plusieurs classes et à la reprise de la guerre. Traduisez : le nez de ce monsieur me déplaît, je préfère le nez de celui-ci. La force pour le plaisir de la force, ce serait, à la fois, crime et sottise. Mais voilà plus de vingt-six mois que nous avons déposé les armes, plus de vingt-six mois que nous raisonnons avec l’Allemagne, plus de vingt-six mois que nous essayons d’obtenir, par la conciliation, qu’elle désarme et qu’elle nous paye. Plus le temps passe, plus elle nous échappe; plus le temps passe, plus nos alliés s’occupent de leurs affaires, avant de s’occuper des affaires communes; plus le temps passe, plus nous laissons se diluer notre énergie et plus nous voyons, si je puis ainsi parler, tomber notre potentiel. Si notre attitude donne à l’Allemagne l’impression que nous sommes désormais incapables d’user de la force, notre affaire est réglée; le traité ne s’exécutera point; l’Allemagne continuera à cacher, derrière ses camouflages, sa situation véritable ; et nous nous réveillerons, quelque jour, en face d’un Empire, riche et puissant, qui nous dictera ses volontés. Si, au contraire, nous voulons fermement ce que nous voulons, et si l’Allemagne nous sent prêts à prendre immédiatement, en cas de nécessité, des garanties et des sanctions, elle cédera, parce qu’à l’heure présente, elle est à notre merci et qu’elle sait la résistance impossible. Lorsque la Gazette de Francfort, plaisantant M. Briand, déclare qu’il n’a pas ganté de velours une main de fer, mais qu’il a ganté de fer une main douce et molle, elle s’expose, par bonheur, à quelque déception. Il serait assurément mauvais que l’Allemagne pût douter ainsi de la force française. Mais, M. Briand a fait, à cet égard, des déclarations tout à fait rassurantes, qu’on ne saurait trop mettre en lumière : « Nous avons