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Mais l’institution la plus prévoyante ne saurait tout régler et les préfets agissaient selon les circonstances. En 1813, après la défaite de Leipzig, une grave crise industrielle menaçant la Rhénanie, le préfet de la Roër, Ladoucette, écrivit aux maires et aux Chambres de commerce sa crainte que des émeutes n’éclatassent dans la population ouvrière privée de travail, et que les perfectionnements mécaniques établis avec tant de peine ne fussent détruits. Il les priait donc de trouver les moyens d’assurer du travail aux ouvriers. Pour sa part, il allait entreprendre de grands travaux d’utilité publique. Les Chambres répondirent que les fabricants rempliraient leur devoir et tenteraient l’impossible pour distribuer des vivres aux ouvriers et les faire travailler au moins la moitié du temps habituel… Des prévoyances si généreuses, pendant cent ans, on ne les retrouvera plus sur le Rhin.


Ainsi voilà éduquée, encouragée, harmonisée, la volonté de travail des Rhénans. Ainsi voilà apaisées les graves luttes de classes qui pouvaient arrêter ou entraver ces activités vivifiées. Ce n’est pas tout : le travail rhénan possède, grâce aux Français, des centres autour desquels se groupent ses efforts et qui offrent une collaboration toute prête aux préfets impériaux. Nous devons donner notre plus sérieuse attention au grand rôle des Chambres de commerce françaises sur le Rhin.

Fondées en 1802 à Mayence et à Cologne, multipliées dès 1806 à Crefeld, Aix-la-Chapelle, Stolberg et Trêves, composées, chacune, d’une dizaine de membres, fabricants de soieries, de drap ou de laiton, grands commerçants, agriculteurs, que président le maire ou le préfet, « elles doivent, dit le décret, faire connaître la situation et les besoins des fabriques, indiquer les obstacles qui pourraient ralentir leurs travaux et les moyens de les écarter, proposer leurs vues sur les diverses améliorations souhaitables. » Elles préparent l’organisation des expositions et travaillent à l’établissement des statistiques.

Du haut en bas de la hiérarchie, tous les fonctionnaires prennent leurs avis. Le 9 octobre 1812, dix jours avant de quitter Moscou, Napoléon les consultait par lettre sur les conditions économiques à imposer à la Russie, et nous possédons la réponse de la Chambre de commerce de Cologne. Vraiment, elles président à toute l’activité économique, sociale et même