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À la fin de l’année, en décembre, George renouvelait à Mme François Buloz les mêmes assurances : elle ne « demande pas mieux » que de revenir à la Revue, surtout si celle-ci s’abstient absolument de politique. « Je ne sais si un temps viendra où la Presse sera libre, mais je sais que depuis longtemps, elle ne l’est plus, et que je fais de la littérature pure et simple, vu que je ne sais pas philosopher à demi, quand je m’en mêle. Vous direz qu’il n’y a pas grand mal à ce que je me prive de philosopher. » Puis George affirme qu’elle ne « boude pas, » mais elle veut connaître les conditions actuelles de la Revue, ou celles qu’on lui ferait à elle : « Demandez cela à Buloz. » Elle sait que les temps sont difficiles, pourtant elle est convaincue que beaucoup de journaux vont disparaître ou languir. On se jettera alors sur les revues. « Celle des Deux Mondes aurait droit d’ancienneté, mais si elle veut surnager au premier rang, il faut qu’elle puisse satisfaire aux besoins de ses rédacteurs. » Elle avoue que les siens ne sont pas minces, et il n’y a pas que les siens.

« Je suis épouvantée, navrée et confondue, continue-t-elle, de ce que vous m’apprenez de Bocage. Ce n’est qu’après avoir reçu votre lettre que j’ai lu la nouvelle dans les journaux. Comment donc expliquez-vous cela ? C’est incompréhensible… »

La petite fille de Bocage, en effet, avait disparu alors pendant cinq jours. Cette disparition affola à juste titre les parents et les amis. Puis l’enfant revint, racontant je ne sais quel conte. Que lui était-il arrivé au juste ? « Je n’ose pas interroger Bocage, écrit George, je crains que la pauvre petite n’ait été victime de quelque odieux libertinage… à son insu peut-être ; dites-moi ce qu’il vous a dit, afin que je sache comment lui parler sans envenimer sa blessure…

« Vous voyez, chère amie, que vous avez à me répondre. Parlez-moi de vos enfants[1]. »

Sur le sujet de ses enfants, Mme Buloz ne reste jamais à court.

« … Vous me dites de vous parler de mes enfants. J’ai une grande fille qui se souvient bien de vous, mais dont vous n’avez aucun souvenir. Comme vous devez le penser, je m’occupe absolument d’elle ; du matin au soir, tout ce que je fais n’a qu’une raison : Marie.

  1. 31 décembre 1851, inédite.