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continuent à susciter des discussions que nous continuons à accepter sans voir qu’elles ne sont qu’une comédie, et chaque jour ainsi perdu accroît l’excitation des réservistes et germanophiles et diminue notre prestige. »


II

La nouvelle du départ de Venizélos et de l’élite de ses amis avait été accueillie avec une stupeur faite de colère et de consternation. Les défenseurs de la politique constantinienne s’inquiétaient des agitations constatées chez l’adversaire. Pressés de partir afin de rejoindre le grand libérateur, les vénizélistes assiégeaient les Légations pour en obtenir les moyens. Il n’était pas douteux que le mouvement national allait s’accentuer, ses partisans ayant peur de rester à la traîne et de payer les pots cassés. Mais bientôt, dans le clan royaliste, on s’était rassuré. Quand ces révolutionnaires maudits auraient quitté Athènes, on y serait entre soi et les intrigues allemandes pourraient se donner librement carrière. Dans l’entourage royal, on se préparait à la résistance. Les défenses du château de Tatoï s’étaient complétées par l’envoi d’un millier d’hommes à Oropos, pour empêcher un débarquement qui prendrait à revers cette résidence. Le gouvernement royal se croyait exposé au plus grand péril et Constantin entrevoyait l’opportunité d’une transaction. Il confiait au directeur du journal Espirini qu’il avait posé comme conditions aux Puissances pour l’entrée en scène de la Grèce : 1° Qu’il prendrait personnellement le commandement des armées ; 2° que le général Sarrail serait éloigné ; 3° que lui Constantin ne serait pas obligé d’avoir un ministère vénizéliste ; et 4° enfin, que l’intégrité territoriale du royaume serait garantie.

Le 28 septembre, il faisait savoir par le Président du Conseil qu’il se déciderait à marcher contre la Bulgarie, si les Alliés exerçaient sur lui une pression qui lui servirait d’excuse vis à vis des Allemands et couvrirait sa responsabilité vis à vis de la Grèce. La guerre contre la Bulgarie, il s’y déclarait disposé, mais il voulait qu’on la lui imposât. Les ministres d’Angleterre et de Russie étaient d’avis qu’on lui donnât cette satisfaction, mais le ministre de France ne voyait dans l’altitude du Roi qu’une feinte destinée à tromper une fois de plus les Puissances