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salut de la Pologne. Souvent déjà le monde catholique a su unir ses prières en faveur de notre patrie : jamais ses supplications n’auront été plus opportunes qu’à l’heure présente…

Verrons-nous l’Europe, après avoir solennellement refusé d’entretenir aucune relation avec le pouvoir bolchéviste, faire soudain volte-face et s’humilier aux pieds de son plus implacable ennemi ? Il y a peu de temps encore, ses hommes d’État repoussaient toute négociation avec le bolchévisme et l’isolaient, comme on met en quarantaine un malade suspect : et voici qu’aujourd’hui ils recherchent eux-mêmes les moyens de faire rentrer les bolchévistes dans le concert des nations ! Après avoir sacrifié son or et son sang pour arrêter le fléau destructeur, fourni tant d’armes et de munitions pour combattre le bolchévisme, l’Europe contemple aujourd’hui d’un œil froid la mêlée inégale où saigne la Pologne tout entière. Notre espoir est dans la prière, qui ramènera l’âme humaine à la vérité, anéantira le sophisme et le mensonge, ressuscitera la conscience de l’univers et animera d’un nouvel élan ses forces généreuses. »


Le principe invoqué en termes émouvants par les évêques de Pologne, ce n’est rien de moins que la vieille et féconde idée de « chrétienté, » si glorieusement et si utilement mise en œuvre par Charles Martel et par Charlemagne, par Henri IV et par Richelieu. C’est à la chrétienté menacée que la Pologne, sur la Narew et sur le Bug, comme autrefois sous les murs de Vienne, servait d’héroïque rempart ; et c’est la chrétienté que l’épiscopat de Pologne adjure de ne point abandonner ceux qui défendent à la fois leur cause et la sienne. On sait comment la France répondit à l’appel de la Pologne, et avec quelle délicatesse toute française le général Weygand, organisateur de la victoire, répondit aux acclamations du peuple de Varsovie en glorifiant l’armée polonaise et en s’inclinant devant la bannière où était brodée l’image de la Vierge de Czenstochowa.


LES SOCIÉTÉS SAVANTES. — LES UNIVERSITÉS.

Avec la religion, l’instrument le plus efficace de la résistance polonaise a été la tradition nationale, jalousement entretenue dans les familles par l’usage de la langue, dans les sociétés savantes par des recherches constantes sur l’histoire de la Pologne, sa littérature, son art, sa philosophie, son ancien droit. Tandis que la jeunesse polonaise était obligée de suivre, dans les gymnases et dans les Universités, des leçons professées