Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 60.djvu/551

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

auteurs de cette manifestation qui fut peu de temps après une des causes de la chute du ministère Zaïmis.

C’est aussi dans cette première quinzaine de septembre, que des mouvements révolutionnaires éclataient dans les îles et particulièrement en Crète, provoqués par les chefs vénizélistes, résidant dans ces pays. Ces chefs demandaient à être appuyés par la présence de bateaux français devant La Canée. Les Anglais en avaient envoyé déjà ; ils avaient même expulsé tous les indésirables. Le Consul de France à La Canée demandait énergiquement qu’on suivît cet exemple et qu’au moins un navire français figurât à côté des Anglais. Vénizélos, après avoir longtemps hésité, se décidait à prendre la direction de ces mouvements : « Ce serait, disait-il, une Grèce honorable constituée à Salonique, en opposition à la vieille Grèce inféodée aux Allemands d’accord avec son Roi traître à son pays. »

Poussé par les germanophiles, Constantin s’entêtait dans son altitude hostile à Vénizélos et la guerre civile était à prévoir. Le service des renseignements arrêtait des télégrammes chiffrés et constatait, grâce à cette saisie, que le gouvernement grec communiquait par Berne, avec Vienne et Berlin. Il demanda qu’on n’autorisât le gouvernement grec à communiquer en langage chiffré avec ses Légations que dans les pays alliés, et que partout ailleurs ce langage lui fût interdit. Mais Paris ne se hâtait pas de donner, sur ces points, des réponses satisfaisantes.

D’autre part, en peu de jours, l’insurrection crétoise s’étendait et devenait menaçante pour le parti constantinien. Par suite du manque d’organisation des vénizélistes, les officiers et soldats de ce parti ne parvenaient à s’embarquer pour Salonique que difficilement et on pouvait craindre l’effondrement de cette tentative. Vénizélos se proposait alors d’aller en prendre la direction. Il avait d’abord voulu partir avec apparat, puis il avait changé d’avis, jugeant plus prudent de s’éloigner secrètement, avec l’aide de la Légation de France. Le gouvernement royal soupçonnant son projet prenait des mesures pour en empêcher l’exécution ; les quais du Pirée étaient gardés, les bateaux en partance visités, les passagers suspects arrêtés. Néanmoins, le service des renseignements parvenait à assurer le départ d’environ vingt-cinq personnages de marque. Par malheur, des indiscrétions étaient commises ; un simulacre d’émeute était organisé sur le cuirassé grec l’Averoff, par