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dans le parti germanophile et dans les cercles officiels, tout le monde s’attendait à de nouvelles exigences de notre part, personne ne pouvant croire qu’une escadre de quarante navires fut venue simplement, pour appuyer la note anodine remise le 2 septembre, et ce qui le prouvait, c’est que le Président du Conseil grec, aussitôt qu’il en avait eu connaissance, avait demandé au ministre de France de la rendre publique afin de rasséréner l’opinion par cette preuve de notre modération. Le ministre des États-Unis exprimait la même opinion en disant que nous nous servions d’un pavé pour écraser une mouche. Il n’était pas étonnant que cette modération fût considérée par les Grecs comme de la faiblesse et causât à nos partisans une désillusion qui les empêchait de manifester leurs sentiments par crainte de représailles politiques.

Du reste, on s’attendait à l’expulsion ou à l’arrestation des personnages le plus en vue tels que Streit ou Stratos. Au Palais, l’alarme avait été si vive qu’on prétendait que nous allions demander le renvoi de la Reine ; les gens se disant bien informés dans l’entourage du Roi laissaient dire que celui-ci s’exécuterait et serait même heureux d’avoir ainsi la main forcée vis-à-vis de son beau-frère Guillaume II pour orienter sa politique vers l’Entente.

Il semble qu’à ce moment nous pouvions demander tout ce que nous voulions et que plus nous demanderions, plus nous obtiendrions facilement, à la condition d’exiger.

Pour le moment, on s’en tenait à l’expulsion de Grèce des Allemands et à leur départ dans un délai de quatre jours. Ces exigences produisaient déjà leur effet parmi ce personnel qui n’avait cessé de conspirer contre nous. Schenck alla demander aux ministres alliés de ne pas être arrêté par la police anglo-française. Hoffmann avait tellement peur qu’il s’informa si, pour le cas où il irait se constituer prisonnier, il aurait la vie sauve ; la réponse naturellement fut affirmative et, le même soir, il venait se constituer prisonnier au service anglais. Il resta emprisonné à la Légation d’Angleterre. De son côté, le Consul allemand, de Syra, brûlait toute sa correspondance.

Dans l’impossibilité où se trouvait le gouvernement grec d’empêcher ces mesures, il avait obtenu qu’aucune arrestation ne serait faite par la police anglo-française avant les délais impartis par les sanctions officielles, et c’est dans ces conditions que peu à peu satisfaction nous était donnée. Mais, faute