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présenté en commun, le 9 janvier 1920, par M. Clemenceau et M. Lloyd George, ou les propositions remises à M. Pachlitch et à M. Trumbitch par M. Clemenceau à une réunion tenue au quai d’Orsay le 13 janvier 1920, on verra que le gouvernement français, où, du reste, l’Italie comptait un ami des plus sûrs dans la personne de M. Pichon, s’est épuisé en efforts continuels pour tenter de donner satisfaction aux réclamations italiennes, particulièrement dans la détermination d’un statut spécial pour la ville de Fiume. Dans les propositions du 13 janvier, il était même indiqué que le « corpus separatum » de Fiume serait soumis à la souveraineté italienne, ce qui allait au-delà des demandes de M. Tittoni et ce qui souleva immédiatement les protestations des délégués yougo-slaves. Ils ne furent pas seuls à protester. Le 20 janvier, M. Lansing télégraphiait à M. l’ambassadeur Wallace pour le prier, au nom du Président Wilson, de rappeler à M. Clemenceau et à M. Lloyd George, que le gouvernement des États-Unis entendait être consulté, comme c’était effectivement son droit, sur les questions italiennes et qu’il ne pouvait adhérer au régime proposé pour Fiume. MM. Lloyd George et Clemenceau s’excusaient de leur mieux dans une note remise le 22 janvier à l’ambassadeur des États-Unis; mais leurs explications ne désarmaient pas M. Wilson, qui, le 10 février 1920, répliquait sur le ton le plus vif, écartait de nouveau toute souveraineté de l’Italie sur Fiume, et nous menaçait expressément de retirer du Sénat le traité de paix et la lettre qui assurait à la France l’assistance militaire américaine, s’il ne nous paraissait pas possible d’amener l’Italie à accepter le mémorandum du 9 décembre 1919. Une note de MM. Lloyd George et Millerand, en date du 17 février, nous valut une réponse plus modérée du Président Wilson ; mais, sur le fond des choses, son opinion était immuable. Il repoussait même la nouvelle demande qu’avait formulée l’Italie d’une bande de terre qui aurait réuni Fiume indépendante à l’Istrie annexée et il s’opposait à toute division de l’Albanie, même faite d’accord entre les Yougo-Slaves et les Italiens. Dans son lit de malade, il demeurait obstinément fidèle à ses idées et il faut convenir que cette opiniâtreté, même lorsqu’elle prenait des formes désagréables pour nous, n’était pas sans grandeur. Le 26 février 1920, nouveau mémorandum adressé à M. Wilson par MM. Lloyd George et Millerand. Le 26 mars, nouvelle réponse du Président. De part et d’autre, on reconnaît que le mieux serait de laisser la Yougo-Slavie et l’Italie négocier elles-mêmes directement un accord sur la question de Fiume; mais M. Wilson tient à déclarer qu’il n’en maintient pas moins le