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avec ses édifices, le temple de la Déesse Céleste et sa colonnade en hémicycle, un groupe de villas ou de riches maisons, un marché, des thermes, — sans parler des mausolées puniques et romains et des inévitables citernes que l’on rencontre dans toutes ces ruines antiques.

Parmi cette abondance de monuments, je voudrais ne considérer que le théâtre, le capitule et son temple principal, celui qu’on voit de si loin, quand on vient par la route du Kef et qui, du haut de sa colline fauve, domine, avec une beauté si souveraine, tout ce paysage africain.


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Grâce aux restaurations dont il a été l’objet depuis un quart de siècle environ, le théâtre de Dougga parait dans un état de conservation merveilleuse. C’est un des mieux conservés, sinon le mieux, de toute l’Afrique du Nord. Avec celui de Khamissa, — l’ancienne Thubursicum Numidarum, — il offre cette particularité d’avoir une façade à peu près intacte. Le mur, qui délimitait le fond de la scène, n’existe plus comme à Khamissa ou comme à Orange. Mais le portique antérieur, qui servait sans doute de promenoir au public, subsiste toujours ; et enfin, chose qui ne se voit qu’ici, qui n’a d’analogue dans les ruines d’aucun théâtre antique de l’Occident, — la composition architecturale qui formait sur la scène un décor permanent est en grande partie debout. Elle consistait probablement en des colonnades superposées et d’ordres différents, qui s’élevaient jusqu’à la hauteur des derniers gradins.

Cette composition est assez compliquée. Le soubassement de marbre blanc, qui supportait les colonnes, dessine en son milieu un hémicycle, flanqué à droite et à gauche de deux embrasures rectangulaires. Ainsi le décor architectural dressé au fond de la scène offrait au regard des lignes sinueuses, dont l’irrégularité voulue était immédiatement corrigée par des accouplements de colonnes placées en avant de l’hémicycle et des deux embrasures et alignées avec le reste de la composition. Dans son ensemble, le décor de fond présentait une colonnade rectiligne, derrière laquelle se creusaient comme des vestibules conduisant à des palais imaginaires et qui encadraient en réalité les trois portes traditionnelles de la scène. Ces portes exhaussées de plusieurs marches grandissaient la taille de l’acteur,