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Plaidoyer suprême où toutes les raisons sont réunies.

Rappelons quelles sont ces raisons. L’avocat résume en somme, dans sa supplique, les deux procès : celui de béatification et celui de sanctification.


Des deux, le plus long et le plus difficile fut celui de la béatification. J’ai sous les yeux les pièces authentiques réunies en cinq volumes imprimés par l’imprimerie de la Propagande, à l’usage exclusif de la Cour Pontificale[1]. Il est capital, pour l’histoire, de suivre la procédure et de découvrir le sens profond de l’enquête.

Nous avons dit déjà que l’opinion populaire y passe au premier rang, à condition qu’il n’y ait pas superstition.

Une fois ce mouvement populaire bien et dûment constate, l’enquête porte sur les vertus héroïques. Et tel est véritablement le fond du procès et non pas, comme on est porté à le croire généralement, l’enquête sur les miracles. En ce qui concerne le caractère de ces vertus héroïques et nécessaires, je ne puis que m’en référer aux règles tracées par le Pape Benoit XIV : « On convient généralement que l’héroïcité est un degré de vertu éminent, très supérieur aux mœurs ordinaires des hommes, même vivant honorablement. Sont « héros de sainteté » ceux qui, au cours de leur vie et jusqu’à leur mort, ont persisté dans une manière d’être innocente, se conformant aux règles du juste et aux préceptes de l’Evangile et qui, se portant ainsi et se maintenant jusqu’au plus haut degré de la perfection, y ont conformé leurs actes, avec un complet dédain des contingences terrestres… Dans les procès de béatification et de canonisation l’enquête sur les vertus porte donc, non sur certaines vertus domestiques ou politiques, mais sur les vertus chrétiennes et héroïques. Et il ne suffit pas de quelques actes, fussent-ils héroïques, ni même de nombreux actes reconnus héroïques ; il faut que soit constatée une habitude ou un état d’héroïsme comprenant à la fois les vertus théologales et cardinales. Et, en plus, il faut que ce soit par des actes multiples que ces vertus se

  1. Sacra rituum congregatione, card. Lucido Maria Parocchi relatore. Aurelianen, beatificationis et canonizationis ven. Servæ Dei Johannæ de Arc : Positio super virtutibus. M C M I in-4o ; et Sacra rituum congregatione, card. Dominico Ferrata relatore, etc. Positio super miraculis. Ex typogr. De Propaganda fide, 1901-1907 ; en plus trois volumes d’appendices.