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comment finit la guerre.

défensive, la France s’est armée la dernière et a pris des précautions extraordinaires pour éviter tout conflit de fait ; mais l’Allemagne, pressée de commencer les hostilités vers l’Ouest, se fait de nouveau l’agresseur et lui déclare la guerre sous un prétexte mensonger.

L’Angleterre, qu’aucune obligation précise n’oblige à entrer dans la lutte, élude d’abord les invitations que lui fait la France, son amie, de déclarer qu’elle prendra place à ses côtés en cas d’attaque de l’Allemagne ; en même temps, elle refuse à l’Allemagne de s’engager à rester neutre en toute circonstance, et elle invite les deux États à respecter la neutralité de la Belgique. Cette neutralité, dont toutes les grandes Puissances européennes se sont solennellement portées garantes, est violée par l’Allemagne. Alors seulement l’Angleterre la somme d’évacuer le territoire belge, et, sur son refus, rappelle son ambassadeur.

L’agression dont les Empires centraux se sont rendus coupables dénoue les liens de la Triple Alliance et permet à l’Italie, dès le début des hostilités, de se déclarer neutre. Revenue à la fraternité latine, elle écoute le cri de ses fils encore captifs à Trente et à Trieste, elle entre dans la lutte avec la Roumanie, que ses enfants appellent de l’autre côté des Carpathes.

Avec une logique inexorable, les Empires centraux, auxquels se sont jointes deux Puissances de proie, la Turquie et la Bulgarie, conduisent la guerre de la même façon qu’ils l’ont déchaînée, au mépris de toute justice, des principes élémentaires du droit international et des conventions par lesquelles les peuples civilisés ont cherché à limiter les maux de la guerre ; seul règne en maître le droit de la force brutale ; l’utilité militaire immédiate excuse tout. D’où la violation de la neutralité de la Belgique ; d’où les incendies et les pillages destinés à terroriser les populations belges qui devaient, dans leur reflux, semer la contagion de l’épouvante et jeter la France aux pieds du vainqueur ; d’où le bombardement des villes ouvertes et le massacre des innocents, l’emploi des gaz toxiques, la dévastation systématique de régions entières au delà du but militaire, enfin la guerre sous-marine à outrance.

Lent à comprendre, plus lent à s’émouvoir, le monde contemplait avec stupeur cette régression qui mettait au service de la barbarie déchaînée tous les progrès scientifiques de la civilisation. Dans la violence de l’action, tous les masques étaient