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se dépouilla de son diadème, de son sceptre, de son manteau impérial, et nomma pour lui succéder, Galère, auquel il donna à son tour pour César un officier des protectores, Maximin Daza.

Le même jour, peut-être à la même heure, la même scène se passait à Milan, où Maximien cédait son trône à Constance, et mettait la pourpre des Césars sur les épaules d’un autre officier : Sévère.

C’est alors que commence pour lui et pour Maximien cette époque de leur vie, connue dans l’histoire sous le nom de « quies Augustorum. » Mais il semble que pendant les huit années où Dioclétien continua à se survivre, dans son immense palais de Salone, entre mer, ciel et monts, passant de ses chasses à son humble jardin potager, l’Auguste vieux et las ne fut jamais considéré comme un homme privé. Jusqu’au dernier jour de sa vie, il garda tous les titres et reçut tous les hommages que méritait son passé ; il demeura pour les nouveaux princes, « notre seigneur et notre père. » Et quand sa dernière heure fut venue, le Sénat de Rome l’honora de cette apothéose, qui équivalait à la divinisation, et qu’on n’accordait qu’aux Empereurs.

Mais il vécut assez pour voir l’issue de la lutte entre l’Empire et le Christianisme, qu’il avait voulu éviter comme une calamité terrible, et pour assister au triomphe définitif du Christianisme, qui devait lui sembler un événement encore plus funeste que la lutte, si redoutée par sa sagesse. Ce triomphe marquait la fin de la civilisation antique, et était la conséquence nécessaire de toute l’œuvre qu’il avait accomplie dans un bien autre dessein.


GUGLIELMO FERRERO.