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Constance était obligé de partir pour la Bretagne, et, tandis que les Germains, forts de son absence, menaçaient la Gaule, Maximien devait courir en Afrique où éclatait une autre révolte.

Dioclétien était donc disposé à faire la paix ; et, dès le début de 298, elle était effectivement conclue, et à des conditions qui pouvaient rappeler les temps lointains où Rome était partout triomphante. Toute la Mésopotamie, jadis conquise par Septime Sévère, était restituée à l’Empire ; de plus, le roi de Perse cédait cinq provinces arméniennes de la haute vallée du Tigre, jadis conquises par Sapor Ier. Les sources ne s’accordent pas à les déterminer. L’Arménie jusqu’à Zinta, dans la Médie Atropatène, était reconnue à Tiridate ; l’Ibérie (l’actuelle Géorgie) devenait un État vassal non plus de la Perse, mais de Rome. L’Empire romain regagnait en Orient une frontière stratégiquement excellente pour la défense de la Syrie et de l’Asie-Mineure, et des alliés précieux ; enfin, il concluait une paix, qui devait durer quarante ans.

Pendant ce temps, Dioclétien réussissait à rétablir solidement l’ordre à l’intérieur de l’Empire. L’anarchie chronique prenait fin, devant un gouvernement stable et régulier. Fermement guidé par les deux Augustes et les deux Césars, et par la sûre volonté et la pensée vigoureuse du premier des Augustes, le navire de l’Etat gonflait ses voiles vers un horizon souriant.. La méticulosité des lois pesait sur les sujets ; mais elle les unissait aussi dans une forte discipline publique ; l’augmentation des impôts même paraissait presque compensée par leur nouvelle répartition, par les méthodes rationnelles de leur perception et par le renouveau de prospérité générale. La nouvelle famille impériale jouissait de la faveur universelle ; sa divinité ne choquait plus personne, même elle était adorée par les peuples sujets, et la felicitas saeculi paraissait vouloir couronner les plus durs efforts de dix-huit années de pénible labeur. La crise politique et militaire, commencée à la mort d’Alexandre Sévère, semblait donc terminée.


V

Malheureusement, il y avait dans l’œuvre de Dioclétien une contradiction qui la minait sourdement. Dioclétien avait cherché à sauver l’Empire des barbares qui l’attaquaient du dehors en le