Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 57.djvu/35

Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’étude des langues étrangères et qu’ils complètent leur formation professionnelle en l’élargissant par la connaissance des questions politiques, économiques et sociales qui conditionnent la vie des pays où ils seront envoyés.

L’œuvre d’ailleurs leur convient à merveille. Leur aptitude est attestée par les réalisations déjà acquises actuellement et, plus encore, par l’œuvre similaire accomplie et soutenue depuis plus de trois générations dans notre domaine colonial. Les vieux soldats de l’Empire s’étaient faits administrateurs, cultivateurs, avec Bugeaud et sa glorieuse équipe. Leurs cadets n’ont-ils pas continué la tradition ? Explorateurs, organisateurs, administrateurs, ils ont contribué largement à donner à la France le superbe empire colonial dont le traité de Versailles vient de consacrer définitivement l’existence en en déblayant les abords. Le point intéressant à noter est que, dans ce domaine, ils ont manifesté une des facultés essentielles de la race, celle précisément à laquelle le pays fait appel aujourd’hui, la faculté de se communiquer, d’éveiller la sympathie, en un mot l’emprise morale.

Que nos colonies, malgré la faiblesse de leurs garnisons, soient restées fidèles pendant cette longue guerre, qu’elles aient envoyé en travailleurs et surtout en combattants sur les champs de bataille de la métropole environ un million d’hommes, que ces régiments de tirailleurs, bataillons de Soudanais, se soient classés indiscutablement parmi les troupes solides et dévouées, cela atteste une emprise morale profondément subie.

Nos officiers qui ont été les principaux artisans de cette œuvre grandiose sont appelés aujourd’hui à utiliser leur faculté d’emprise morale sur un autre champ d’action. Il ne s’agit pas d’y initier les peuples à la civilisation, il s’agit de propager notre influence, de faire connaître la France, de la faire aimer, de lui conquérir la force immense de l’opinion, et ce n’est pas le moyen le moins efficace de gagner la paix.

Les lendemains de guerre sont toujours une période de crise. Cette fois, la crise a été longue et particulièrement violente : après cinq ans d’absence retrouve-t-on la case où la mobilisation est venue chercher le soldat-citoyen et, si on la retrouve,