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ainsi qu’il arrive, de nos jours encore, dans maint port levantin. Le gouverneur avait, fort à faire pour maintenir le calme dans un milieu si mélangé et le corps de police local ne pouvait guère se passer de l’aide des légionnaires. La garnison importante que les Romains y maintinrent toujours et qui campait à l’endroit même qu’occupent aujourd’hui les casernes des troupes anglaises, facilitait la tâche. Dans l’intérieur du pays, l’intervention militaire n’était pas moins nécessaire. Il existait un peu partout une gendarmerie locale, à formes diverses, mais insuffisante ; au-dessus, il avait fallu placer des officiers ou des sous-officiers de l’armée régulière, pour lui donner des ordres, recevoir les plaintes des habitants, prendre les mesures de sûreté contre les attaques des malfaiteurs, les faire poursuivre et emprisonner.

Pour compléter le tableau de ce qu’était la vie des soldats romains en Égypte, il faut ajouter que toutes ces besognes peu militaires, en somme, au sens noble du mot, étaient coupées de fêtes et de cérémonies annuelles qui en rompaient de loin en loin la monotonie. Deux fois par an, surtout, les camps étaient en liesse, au jour anniversaire de l’Empereur et pour les Saturnales.

C’est encore un papyrus qui nous apprend ce qui se passait dans le premier cas. Nous sommes au temps de l’empereur Sévère Alexandre. Dans le moindre village du monde romain on sacrifie en son honneur ; les soldats de la cohorte auxiliaire qui tient garnison à Syène célèbrent, comme les autres, la date solennelle. Ils vont d’abord dans les édifices religieux voisins du prétoire, pour honorer les dieux protecteurs de l’armée ; les officiers marchent en tête, ainsi qu’il convient. La procession achevée, ils reçoivent, de la part du prince, des gratifications en argent. Ces libéralités faisaient partie des usages que les empereurs laissèrent s’établir par faiblesse et acceptèrent par ambition ; plus d’un leur dut successivement son élévation et sa mort ; car on n’arrive jamais à contenter longtemps les foules.

En échange, tous, à la suite de leur commandant, s’empressent d’adorer l’Empereur et sa mère Julia Mamaea, « mère d’Auguste et des camps ; » ils couronnent leurs statues, ils sacrifient sur leurs autels, ils supplient les dieux de leur accorder la prospérité. Ceci fait, comme nous sommes à l’armée, on procède à une grande revue, avec les différents exercices