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qui a salué son avènement. Jamais notre, pays n’a été davantage sur le devant de la scène. Qu’il soit lui-même ! Qu’il se montre en son naturel avec son esprit de mesure, sa modération, sa raison, son bon sens, et aussi avec ce quelque chose d’essentiellement libre et aisé, enjoué et élégant qui lui appartient en propre.

Je supplie la nouvelle Chambre, puisqu’elle se réunit à une heure historique et, si j’ose dire, sous les yeux du monde, de se garder avec un soin jaloux de ces tendances à la vulgarité qui gâtaient les mœurs de celles qui l’ont précédée. La camaraderie trop facile a causé la perte de la « République des camarades. » Il est de certaines accointances dont nos parlementaires feraient bien de se méfier. Des incidents récents ont averti les électeurs. Certaines exécutions sans bruit sont significatives. Le pays veut que sa représentation le représente bien : 1 500 000 Français ont payé de leur vie la noble idée que l’on se fait au dehors de notre pays et la haute situation qu’il occupe. Que les survivants se montrent dignes d’un si impressionnant héritage ! La République romaine, siégeant dans son Sénat, n’avait pas de devoirs plus hauts ni de responsabilités plus lourdes que celles qui incombent à la République française au milieu de l’Europe encore bouleversée.

Une France pacifique et ferme, confiante en ses amis et en ses alliés, ralliant l’Europe autour d’une conception généreuse et juste, protectrice des États faibles, gardienne vigilante des conventions, collaboratrice convaincue de la Société des Nations, attentive aux retours et aux égarements de ses ennemis, mais patiente, raisonnable, gardée par son sang-froid et par la grandeur même de ses sacrifices contre tout système d’ingérence dangereuse ou envahissante, en un mot une France qui soit juste à l’opposé de l’Allemagne de Bismarck, une France bonne européenne, tel me paraît être le rôle que nous devons adopter délibérément au point de vue des affaires extérieures, et que la nouvelle Chambre, d’après le vœu formel des électeurs, saura remplir. En deux mots : que la paix soit digne de la guerre !


III. — LA POLITIQUE INTÉRIEURE

En ce qui concerne les problèmes intérieurs, bien des hypothèses et des calculs sont permis. Nous sommes, dès le