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gneiss et schistes, dont sont formées les montagnes qui ceignent la Campagne ou les bassins intérieurs, sont propices au ruissellement ; sans doute, à la base des calcaires de la région des Lacs, les eaux sourdent en toute saison ; dans la Karadjova, autour de Monastir, les canaux d’irrigation sont associés au moindre champ ; la houille blanche alimente les filatures de coton de Vodena. Cependant, à part les exceptions des oasis du pied des pentes, l’eau, abondante en hiver, était perdue durant l’été : les indigènes se contentaient de l’eau infecte des rivières boueuses, des mares croupissantes, et dans les montagnes mêmes le manque de pluies, de juin à septembre, tarissait les sources ou en diminuait singulièrement le débit. Les monts pelés, qui bornent au Nord-Ouest l’horizon de Monastir ou qui couvrent l’intérieur de la boucle de la Tcherna, sont particulièrement déshérités à cet égard.

Ce fut précisément sur ces hauteurs qu’après l’offensive de 1916 stoppa l’armée victorieuse. Il fallait donc creuser la plaine jusqu’à la nappe aquatique, capter et aménager les sources de la montagne, édifier ici des puits, là des réservoirs, et partout, pour sauver les équipages muletiers de cette armée alpine, installer des abreuvoirs. Ce fut la tâche d’un service des eaux créé en octobre 1916. Salonique, base de l’armée, agglomération des dépôts, centre hospitalier et Grand Quartier Général, n’avait pas d’eau potable à l’automne 1916. Les hôpitaux des « Campagnes, » quartier Sud de la ville, consomment entre 30 et 40 mètres cubes d’eau saine par jour ; les camps de Zeitenlik, aux portes Ouest de Salonique, ont besoin quotidiennement de 600 mètres cubes. A Zeitenlik, nos hydrauliciens du génie remettent en état douze puits artésiens de l’époque turque, en forent un treizième de plus fort débit, dressent une machine élévatoire. A l’Est, instruits, grâce aux découvertes du nouveau service archéologique, par l’exemple romain et l’expérience byzantine, ils construisent un aqueduc jusqu’au Hortiatch, qui, à 11 kilomètres de la ville, à l’entrée de la Chalcidique, ferme l’horizon de son faite boisé. Grâce à cette adduction, Salonique disposera chaque jour de l’été 1918 de 2 000 à 2 500 mètres cubes. Quand la base annexe d’Itea fut établie sur le golfe de Corinthe, en trois mois (janvier-mai 1918) une canalisation de 9 kilomètres vint distribuer au camp, au port, dans le village, les eaux de Delphes captées à 2 500 mètres