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les frais de nettoyage et d’entrepôt. En même temps, on amasse, dans des magasins municipaux, du bois et du charbon pour le rigoureux hiver à venir : les riches se les procurent moyennant finances, les pauvres avec les bons de l’Assistance publique. L’Assistance de Koritza dispose de 100 000 francs chaque année.

Ainsi la France apporte le pain et la paix. Sans doute la police équitable, dans ces confins albanais où le moyen âge survit, ne fait-elle pas la joie de tous. « L’homme brave qui a des armes et des fils, déclarait un notable avec humeur, est devenu l’égal du berger. » Mais les regrets des féodaux constatent la tranquillité des campagnes. Pendant l’été 1918, dans les villages de la montagne, le passant ne peut rien acheter : l’indigène n’éprouve point le besoin de vendre. Le prolétaire trouve comme terrassier du travail sur les routes, que trace le génie français, et un suffisant salaire (5 francs par jour, plus une boule de pain, de la graisse, du sel, du sucre, du café et des légumes) ; même les enfants, engagés comme casseurs de cailloux, reçoivent, outre ces vivres, une demi-boule et 1 franc. Koritza respire un air prospère : dans la rue des Marchands, des quartiers de viande, d’agneau surtout, pendent à l’étal des bouchers ; sur les trottoirs, les vendeurs exposent oignons et aulx, melons et pastèques, et l’inévitable paprika. Les récoltes s’accumulent dans les greniers administratifs ; le pain est assuré à la population entière, nos troupes garantissent la sécurité. Jamais cette ville, rançonnée jadis par toutes les armées, ne s’est trouvée si heureuse. Chrétiens et musulmans. Grecs et Albanais y vivent en parfaite intelligence, et, dans le conseil des notables qu’alternativement ils président sous la tutelle désintéressée des officiers français, l’un et l’autre sont insoucieux de prosélytisme religieux, de propagande nationale. Exemple topique de la « paix française. »


Après le pain, assurer l’eau est l’indispensable besogne. La Macédoine littorale et la Macédoine intérieure subissent les étés secs du littoral méditerranéen ; la Campanie salonicienne réédite la Mitidja d’Alger du milieu du XIXe siècle ; les plaines élevées de Macédoine rappellent par leur climat les Hauts Plateaux steppiques de l’Afrique mineure. Sans doute les granits,