Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 55.djvu/878

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gueuserie, trouvait le secret de la métamorphose du pain. »

Depuis quelque temps de là, Pimpette était dégrisée ; la pauvre petite épouse, par la faute de sa malencontreuse union, avait connu de dures épreuves. Dans un bal costumé, Winterfelt ne l’adressa-t-il pas à quelques jeunes seigneurs pour leur emprunter de l’argent, en lui conseillant de leur offrir en échange certaines complaisances amoureuses ? Ce soir-là, Winterfelt fit assommer sa belle-mère, mais elle en réchappa ; il lui promit alors gracieusement « vingt coups d’épée lorsqu’elle serait morte ! »

Parlant de sa fille, Mme du Noyer écrit : « S’il (Winterfelt) avait pu en tirer de l’argent, il l’aurait vendue ou engagée, mais comme il ne put pas trouver le moyen de la négocier, elle me resta, et j’eus le plaisir de la ramener en Hollande. »

Pimpette, en effet, dégoûtée à tout jamais de cet époux qui l’avait dupée, revint à la Haye. Hélas ! elle y revint enceinte. Maintes surprises l’y attendaient encore, et d’abord les scellés apposés sur son logis et ses coffres ! Leduc de Marlborough intervint dans cette affaire-ci. Qui n’intervint alors, dans la vie de Mme du Noyer !

On ne peut se faire une idée de tant d’aventures ! Aucun roman n’est plus bizarre et plus mouvementé. Il y a de tout : du comique, lorsque Winterfelt aux abois, simule des crises nerveuses pour gagner du temps ; du tragique lorsque Pimpette, grosse de neuf mois, ne peut trouver dans la Haye un abri.

Elle est futile, cette Pimpette, elle est légère, inconstante ? — Elle est aussi bien jeune pour éprouver tant d’infortunes. Plus tard, comme sa sœur, elle se lassa de sa vie aventureuse et retourna en France. Quant à Mme du Noyer, dépouillée de ses biens, bijoux, meubles et immeubles, elle demeura jusqu’à la fin de sa vie incorrigiblement étourdie, bavarde, mauvaise langue, emportée, menteuse, tous défauts qui avaient causé son propre malheur, celui de son époux, et les déplorables aventures de ses filles.


MARIE-LOUISE PAILLERON.