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coulait comme l’eau ; il n’y avait rien de trop bon, rien de trop beau pour ces Messieurs ; je pénétrais bien le motif de ma mère à l’égard de Cavalier... » [1] Le motif ? Cette dame le voulait pour gendre ; d’ailleurs, le colonel devint rapidement amoureux de Pimpette, offrit de l’épouser et lui signa même un engagement : « Je soussigné promets à Mlle Olympe du Noyer de l’épouser dès que mes affaires me le permettront... » Hélas ! ces affaires étaient fort embrouillées, si embrouillées qu’avant de partir pour l’Angleterre le héros dut avouer sa gêne à la future belle-mère, qui généreusement lui donna pour Londres une lettre de crédit... Il en profita si bien qu’il « se divertit deux mois en Angleterre » avec les livres sterling de la dame ! « C’est un gouffre, écrit-elle. J’étais une vraie vache à lait ! » — Achète-t-elle une maison ? il la lui fait mettre à son nom. — Lui montre-t-elle un de ses brillants ? il le lui demande, et... elle le lui donne !

Et Pimpette ? Pimpette aime ; elle est folle de son camisard. « Elle ne voulait avoir de l’esprit que quand il lui parlait, ni paraître aimable qu’à ses yeux... Quand il partit pour l’Angleterre, elle coupa ses cheveux pour qu’on ne put pas l’obliger à se coëfer pendant son absence ; enfin elle avait des délicatesses et une constance qui n’est nullement à la mode. »

Le mariage de Pimpette annoncé, publié, valut à celle-ci la jalousie des réfugiés, et le roi de Pologne ayant remarqué la beauté de la jeune fille, ils eurent tôt fait de la lui donner comme favorite. Pimpette saisit ce prétexte pour écrire à son amant ;


On t’a dit, mon cher Cavalier,
Que l’Auguste Roi de Pologne,
Touché de ma petite trogne,
Avait voulu l’encornailler.
Cela est faux ou que je meure. —
…………
Pour mon cher Cavalier ma tendresse est constante,
Et lui seul me fait soupirer.


Sur ces entrefaites, Pimpette apprend que son amant s’est marié au retour de Londres, et .Mme du Noyer, outrée, s’élance

  1. Mémoires de M. du Ployer. Nourse, 1758, à Londres.