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agents ont été arrêtés le 19 janvier par les autorités françaises ; à l’instigation d’un ministre socialiste prussien ils auraient soudoyé et armé un assassin pour débarrasser les gouvernants de la Prusse et du Reich d’un patriote rhénan dont les idées et les succès paraissent à Berlin de plus en plus dangereux. Cette affaire, qui n’est pas éclaircie à l’heure où nous écrivons, prouve en tout cas l’efficacité vigilante de la protection des autorités alliées.

Après la mise en vigueur du traité, le commandant de l’armée d’occupation n’a plus qu’un rôle strictement militaire, la direction politique relevant de la haute commission interalliée siégeant à Coblentz sous la présidence de M. Paul Tirard, assisté d’un haut-commissaire anglais, américain et belge. « Les administrations allemandes, disons pour être plus précis et exact, les administrations prussiennes, reprenant l’entière disposition et l’entière autorité sur les services publics de la rive gauche du Rhin, la commission interalliée conserve simplement, aux termes du traité de paix, le droit de veiller à la sécurité des armées d’occupation et de prendre toutes mesures de protection, de façon à préserver les troupes d’occupation contre les désordres éventuels [1]. » Dans la limite de ses attributions, la Commission a le droit de rendre des ordonnances qui ont force de loi et, si limité que paraisse au premier abord son pouvoir, il est en réalité très étendu, puisque c’est en définitive à la Commission, s’appuyant sur les armées occupantes, qu’incombe la charge et la responsabilité de l’ordre. « Personne en France, conclut M. Tirard, pas plus que dans les autres démocraties alliées, personne n’admettra que la force des baïonnettes qui ont combattu pour la liberté, vienne soutenir une administration de tyrannie au profit de qui que ce soit. »

Les Alliés ont combattu pour délivrer l’Europe du danger permanent du « militarisme prussien. » Or les Allemands, eux aussi, ou tout au moins une partie d’entre eux, demandent à être délivrés du régime prussien, dont le « militarisme » est l’expression la plus complète, ; à ceux-là les Alliés ne peuvent refuser leur appui. La France, tout particulièrement, peut et

  1. Discours de M. Paul Tirard, haut-commissaire de la République dans les provinces du Rhin, au banquet de l’Union des grandes associations françaises, le 22 octobre 1919.