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gouvernement du Reich allemand à Berlin. Dans tous ces documents, le gouvernement provisoire de la République, établi à Wiesbaden, en Hesse, invoquait le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et se réclamait de la Société des Nations.


V

L’initiative du docteur Dorten et de ses amis, bien qu’elle ait été préparée et annoncée par une série d’actes antérieurs, éclata comme une surprise ; la timidité des Rhénans fut abasourdie de tant d’audace, déconcertée par l’absence d’estampille officielle et de signature au bas des proclamations ; habituée à obéir au mot d’ordre du pouvoir, quel qu’il soit, elle attendit que les autorités alliées, ou le gouvernement, ou les chefs des grands partis locaux, lui dictassent son attitude. Vaine espérance ! Les autorités alliées, résolues à ne pas intervenir dans les affaires intérieures allemandes, gardèrent un silence dont les raisons élevées restaient impénétrables à des cerveaux germaniques. Les chefs du Centre, parti prépondérant dans la province rhénane, attendirent plusieurs jours avant de séparer leur cause de celle du docteur Dorten. La Kölnische Volkszeitung, qui avait mené la campagne préparatoire, en se dégageant d’’une tentative au succès de laquelle elle ne croyait pas, attaquait plus violemment que jamais la politique centraliste de Berlin et prenait la défense des députés Kastert et Kuckhof et de leur attitude. La Gazette de Cologne enregistrait la décision du parti du Centre à l’Assemblée nationale et remarquait qu’en désapprouvant l’initiative du Comité de Wiesbaden, le Centre ne condamnait pas l’aspiration à une république rhénane, constituée par les voies légales dans le cadre du Reich. La Germania, organe berlinois du Centre, n’osait pas non plus désapprouver sans réserves le mouvement : « La population des pays rhénans, disait-elle, a le devoir de montrer une grande retenue ; si elle nourrit des sentiments séparatistes et les considère comme justifiés, elle pourra les faire valoir plus tard. » (3 juin.) En résumé, dans les masses, surprise ; chez les dirigeants, hésitation, puis recul : tel fut l’effet régional immédiat de l’acte du 1er juin.

Berlin, au contraire, agit avec vigueur. Les chefs social-démocrates prirent partout une attitude hostile à la république