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liberté rhénane. » Dès le 26 novembre, avaient paru en Hesse-Nassau dans la Rheinische Volkszeitung, cinq articles du professeur Claus Kraemer, revendiquant pour les peuples allemands le droit de disposer d’eux-mêmes. Dans le Palatinat se dessinait un mouvement en faveur de la constitution d’une république autonome séparée de la Bavière.

Chez les Rhénans, dans les semaines qui suivirent l’armistice, régnait la conviction générale que les Français étaient résolus à annexer la rive gauche du Rhin, ou tout au moins à imposer la création d’un État indépendant. Le Centre catholique rhénan voyait dans la fondation d’une république autonome le meilleur moyen de prévenir les desseins qu’il nous prêtait et, en même temps, d’écarter la tyrannie socialiste et le nouveau Culturkampf inauguré par les projets d’Adolf Hoffmann pour le régime des cultes. La Gazette populaire de Cologne « Kölnische Volkszeitung), le grand organe populaire catholique, menait la campagne : « Berlin, imprimait-elle le 23 décembre, n’est pas le cœur de l’Allemagne, mais seulement un centre intellectuel ; » c’est « la capitale des provinces barbares de l’Est de l’Elbe » « 28 décembre). Faisant allusion au rôle historique de la région rhénane entre la France et l’Allemagne, elle l’appelait, d’un mot éloquent qui fait image, « le pont rhénan des peuples » dont la mission est d’organiser le germanisme barbare selon les principes de la civilisation romaine (22 décembre). Elle proposait la division de l’Allemagne en quatre républiques ayant chacune son autonomie économique et politique : Allemagne du Rhin, Allemagne du Danube qui engloberait, avec la Bavière, l’Autriche de langue allemande, Allemagne du Nord, Allemagne centrale. Tous ces projets qui s’ébauchaient, toutes ces aspirations qui cherchaient à se préciser, se rencontraient en plein accord au moins sur deux points : le premier, c’est que les régions rhénanes forment une unité distincte et politiquement réalisable ; quant au second, la Gazette de Francfort le définissait sans ambages en ces termes le 12 décembre : « c*est la fin de l’hégémonie prussienne. »

« Fin de l’hégémonie prussienne, » dans l’esprit des Rhénans, comme aussi des gens du Sud et des Hanovriens, n’est pas le synonyme de fin de la grandeur allemande, il en est l’antithèse. Le hobereau prussien Bismarck, par la force de