Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 55.djvu/673

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans la pratique avant de s’inscrire dans les lois, si seulement elle est un jour proposée et acceptée, d’un commun accord, par le gouvernement en ses conseils, comme une restriction de guerre. Nous demandons aux ministres d’abandonner pour un temps leur liberté de dépense entre les mains du ministre des Finances qui, avec la responsabilité effective de l’ordre, de l’économie, de l’équilibre, aura ainsi l’autorité effective : nécessité temporaire, espérons-le, mais nécessité impérieuse.


VI

S’il est indispensable qu’au point de vue financier, le ministre des Finances soit revêtu d’un certain droit de prééminence dans le gouvernement, il ne l’est pas moins qu’à ce même point de vue il soit en mesure d’exercer une certaine autorité au Parlement. On sait que ce n’est guère le cas. La faiblesse de l’Exécutif par rapport au Législatif est un des grands maux de notre vie politique. En Angleterre on se plaint que le gouvernement « contrôle, » comme disent les Anglo-Saxons, le Parlement, dont il est l’émanation et dont il fait ce qu’il veut, tant qu’il y a la majorité : c’est le résultat du système discipliné des partis. En France, tout au contraire, c’est le Parlement qui commande et tend à absorber le gouvernement : conséquence du régime des majorités artificielles, et surtout des mœurs politiques dont vit notre république. Le gouvernement parlementaire est dans une large mesure remplacé par le gouvernement du Parlement, qui en est tout juste l’opposé. Au grand jour ou dans l’ombre, la Chambre paralyse l’action des ministres en s’efforçant d’y substituer la sienne. C’est un cercle vicieux : plus le Parlement empiète sur le Gouvernement, moins le Gouvernement a d’autorité à la Chambre ; et moins il a d’ascendant sur le Parlement, plus le Parlement est porté à usurper.

Ce sont là, dans l’ordre financier, des mœurs déplorables, et qui sont pour beaucoup dans le désarroi actuel de nos finances. Les assemblées parlementaires ne sont pas faites pour le gouvernement des finances, leur fonction n’étant que de contrôler et de sanctionner ce gouvernement. Or la Chambre, comme l’ont montré les dernières législatures, veut gouverner les finances comme le reste. Par la Commission du budget, ce