Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 55.djvu/666

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

veille. La seule solution possible est celle que nous inspireront notre énergie, notre honneur et notre fierté patriotique.

Que faut-il pour restaurer nos finances ? Nous n’entendons pas parler ici des grandes opérations que tout le monde juge nécessaires et dont on ne peut que déplorer le retard : consolidation de la dette flottante, restriction de la circulation fiduciaire, création de nouvelles ressources fiscales. La question est de savoir ce qu’il y a à réformer dans le courant de notre conduite financière pour rentrer dans la voie droite. Il faut d’abord, de toute évidence, endiguer le flot des dépenses extraordinaires et nous réaccoutumer à vivre sur notre revenu, c’est-à-dire sur l’impôt ; il faut donc faire rentrer énergiquement cet impôt, en coupant court aux faiblesses législatives ou administratives dont profitent aujourd’hui un trop grand nombre de contribuables pour se soustraire aux charges communes. Il faut rétablir l’ordre, la règle et la lumière dans les finances publiques, et les rendre, selon l’expression du baron Louis, « tellement transparentes que chaque citoyen puisse en quelque sorte les juger comme ses propres affaires : » budgets et comptes sont à refondre, méthodes et pratiques à régulariser selon les principes les plus sévères, si l’on veut que notre gestion redevienne correcte et saine, et que le contribuable, à qui un énorme effort fiscal va être demandé, se sente porté à comprendre et à remplir avec conscience l’impérieux devoir.

Enfin, il faut que par l’économie la plus rigide, nous réduisions au strict minimum les charges budgétaires, les frais généraux de la nation. Nous avons, comme au temps de Galonné et comme disait Galonné, « une ressource considérable dans les abus. » Supprimer toutes les dépenses parasites, ajourner tout ce qui n’est pas essentiel, contenir tous les envahissements, aveugler toutes les voies d’eau par où s’écoule « l’argent de la France, » c’est aujourd’hui l’œuvre vitale et nécessaire, a Rien ne simplifie les finances publiques comme l’économie dans les dépenses, écrivait il y a une centaine d’années J.-B. Say ; l’art de la finance n’est si difficile que parce que l’art d’économiser n’est pas connu. » Et tout récemment un Anglais, le professeur W.-R. Scott, ne déclarait-il pas que « le grand problème de l’après-guerre serait bien moins une affaire de répartition et de productivité fiscale qu’une question de discipline dans la dépense ? »