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1886, de ses fonctions, comme hostile à l’oligarchie et protecteur avéré des aborigènes, Sir John fut réintégré dans son gouvernement, au bout de quelques mois d’énergiques protestations. Il revint dans notre île, où l’attendait triomphalement l’accueil unanime, ardemment enthousiaste et reconnaissant, de cette population, dont il avait, officiellement, apprécié l’indiscutable supériorité pour l’aptitude aux emplois exclusivement réservés, jusque-là, aux protégés du bureau colonial. « Maurice aux Mauriciens ! » tel fut le cri réformiste et le programme politique de l’époque. Sir John avait reconnu nettement, que les Mauriciens étaient aussi dignes de se gouverner eux-mêmes que les « british-born, » jusqu’alors seuls en droit d’être promus aux hautes fonctions. Après soixante-quinze années de luttes et de revendications, lord Derby accordait enfin à la Communauté Mauricienne une représentation élective restreinte. Sur les vingt-huit membres qui composent le Conseil législatif, on admit dix élus au suffrage restreint. Quelques années encore assez violentes succédèrent à cette crise réformiste. Mais le calme renaquit peu à peu et, depuis une trentaine d’années, les noms des Mauriciens de vieille souche sortirent constamment des urnes.


« Combien Maurice est complètement français, c’est là une chose dont vous ne vous faites pas idée en Angleterre, » écrivait Lady Barker dans ses Letters for Mauritius. » Le Roi Georges V, à la visite qu’il fit à l’île Maurice en 1901, alors qu’il était prince de Galles, dit : « Les familles mauriciennes sont douées des traits charmants de la vieille France. »

Le gouverneur d’alors, Sir Charles Bruce, ajoute que, chez le Mauricien d’origine « les traditions personnelles s’associent à des vertus de naissance, qui trouvent leur expression dans le proverbe : « noblesse oblige. » D’autres gouverneurs. Sir John Pope Hennessy, Sir Gerningham, et ces jours derniers le gouverneur actuel assuraient l’attachement du Mauricien français à sa patrie d’origine. « C’est une très vieille et très jolie France, » ajoutait Jules Lemaître, en préfaçant le livre magistral de Hervé de Rauville, L’Île de France contemporaine.

Depuis plus de cent ans que notre colonie a été annexée au