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« Vous connaissez maintenant notre plan. Pour le réaliser, nous avons les hommes, l’outillage, les connaissances techniques nécessaires et l’expérience du pays : il ne nous manque que l’argent. Dans une telle entreprise, la France, grosse créancière de la Russie, aurait tout intérêt à devenir l’associée de l’Allemagne. Ce que nous offririons aux Français, ce n’est pas seulement un moyen de rentrer dans leurs capitaux, mais le placement avantageux de capitaux nouveaux, des débouchés commerciaux considérables et de larges facultés d’échange. Les Américains ont complètement échoué en Russie : ni leurs méthodes, ni leurs goûts ne s’adaptent aux habitudes et aux besoins de ce pays. Il appartiendrait à la France et à l’Allemagne, par une action commune et bien concertée, de réorganiser économiquement le territoire russe et d’en exploiter les énormes richesses, pour le plus grand avantage des trois pays, et du monde entier. »

L’exploitation de la Russie, c’est aujourd’hui la grande idée de l’Allemagne. Ne pouvant agir seule, elle cherche des associés, qui, bien entendu, travailleraient sous sa direction et à son profit. Et elle emploie à cette intention les « démarcheurs » les plus variés et parfois les plus inattendus.


16 octobre.

C’est aujourd’hui la quatrième visite que je reçois, depuis un mois, d’anciens policiers allemands, qui, avec l’espoir avoué d’un gros pourboire, et dans une intention de vengeance personnelle à peine dissimulée, s’offrent à me révéler tous les détails des organisations secrètes qui fonctionnèrent en Belgique et dans le Nord de la France, et les auteurs responsables des atrocités commises dans les régions occupées. « Nous vous donnerons tous les noms, toutes les adresses, toutes les preuves. Vous publierez cela à Paris, dans les journaux. » Et ils semblent très étonnés lorsque je leur réponds que ce n’est pas là mon affaire.


19 octobre.

Je ne suis ni monarchiste, ni militariste, me dit M. S..., fonctionnaire allemand très instruit et très intelligent. Mais je n’étais pas d’avis que l’Allemagne acceptât les conditions du traité de paix. Je pense que nous aurions dû, en même temps,