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d’âmes allemandes un besoin de mysticisme, que la religion luthérienne est impuissante à satisfaire. Le terrain est tout préparé pour une large et rapide conquête. Assurément Rome devra faire certaines concessions, non pas d’ordre dogmatique, mais d’ordre disciplinaire : admettre, par exemple, le mariage des prêtres, en maintenant l’obligation du célibat pour les évêques, comme il est de règle dans certains rites orientaux. On n’a rien pour rien, et la chose en vaudrait la peine. » Je fais d’abord quelques objections, et puis je n’en fais plus : c’est inutile. En dépit de sa culture catholique et de ses accointances romaines, M. M... reste un Allemand protestant.

Il continue : « L’Internationale socialiste a fait faillite : la guerre mondiale, puis le bolchévisme l’ont compromise. L’Internationale catholique est intacte, ou plutôt elle est en progrès. Dans la société de demain, elle jouera un rôle considérable : non seulement un rôle religieux, mais aussi un rôle politique. Rome restera la capitale religieuse du catholicisme : il faut que Vienne en soit la capitale politique. » Je reconnais le fameux projet attribué à l’impératrice Zita, mais dont la paternité revient sans doute au père Andlauer et au père Ledochowski.

« Il faut bien que Vienne demeure le centre de quelque chose. Vous avez détruit la monarchie austro-hongroise ; mais vous n’empêcherez pas que Vienne ne reste une capitale. Elle est une capitale qui cherche son empire : elle le trouvera. »


COMMENT UN ANCIEN BOLCHÉVISTE ENVISAGE LA PÉNÉTRATION ALLEMANDE EN RUSSIE


14 octobre.

Long entretien avec le docteur H., ancien bolchéviste russe, devenu social-démocrate allemand. H. dont le pseudonyme fut un moment célèbre, a été en 1905 l’inventeur des soviets, et, un peu plus tard, le précepteur politique de Trotsky. Il est resté en relations avec son ancien élève et avec Lénine, mais a publiquement désapprouvé l’application que faisaient de principes qui lui sont chers les deux maîtres de la Russie. Il a passé en Scandinavie la dernière période de la guerre, faisant des affaires qu’on dit avoir été fructueuses, et rendant aussi,