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réalisation. Sous son impulsion, l’Université prendrait appui, obligatoirement, sur la société provinciale, à laquelle la rattacheraient ses anciens élèves. Elle appellerait des personnalités locales à participer à son activité scientifique. Elle serait amenée à adapter ses enseignements aux ressources et aux besoins de la région, à orienter ses recherches dans des voies jusqu’ici délaissées. Ainsi apparaîtraient des enseignements et des travaux, qui font encore défaut en France ; ainsi s’organiseraient d’elles-mêmes la division du travail scientifique, la spécialisation, la recherche originale.

Une quinzaine de corps d’État, à cinq Facultés, répartis en France pour distribuer un enseignement supérieur uniforme, défendus contre toute influence et participation locales, l’investigation demeurant ainsi aiguillée vers les mêmes directions, et d’ailleurs négligée : c’est une formule périmée. Là dessus l’exemple des États-Unis est probant. Un des maîtres qui ont étudié avec le plus de pénétration la vie scientifique de nos amis d’outre-mer, M. Maurice Caullery, dit que la caractéristique en est « l’élargissement énorme de la notion d’Université, qui, débordant largement nos cinq Facultés consacrées, couvre maintenant toutes les branches de la société moderne, et répand largement les méthodes de la science positive avec l’idée de sa puissance. »

C’est là que doivent en venir nos Universités. Il n’est pas possible que, dans cette paix hasardeuse, notre pays conserve une organisation de travail surannée, après qu’en pleine guerre il a manifesté d’un tel éclat ses puissances d’invention. Nos maîtres d’ailleurs sont déjà passés des doléances ou des vœux à des réalisations remarquables, — que nous allons examiner.


L’ŒUVRE DE NOS UNIVERSITÉS RÉGIONALES : LES INSTITUTS TECHNIQUES

La plupart d’entre nous, à cette heure, ont cessé d’ignorer quel étonnant « rétablissement » l’industrie française dut faire, après août 1914, pour procurer à nos armées l’armement et les munitions nécessaires et pour répondre à la redoutable offensive de la chimie de guerre allemande. Ils savent le fait, mais se l’expliquent-ils ? Savent-ils comment cette industrie, privée de main-d’œuvre et de matières premières, réussit à. improviser des installations et une production formidables ?