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main-d’œuvre, ni de crédit, faute de place : ainsi, la chaire de physiologie végétale. Et c’est souvent pour la même raison, d’une pitoyable mesquinerie, que des enseignements, prospères à l’étranger, ne sont pas encore créés chez nous.

En même temps que les sciences croissent et se multiplient au delà de toutes prévisions, le nombre des esprits qui s’y initient augmente. La victoire va amener de tous les points du monde, par centaines et par milliers, des jeunes hommes désireux de recueillir nos leçons magistrales. Le laboratoire d’enseignement de la chimie de la Sorbonne ne peut accueillir tous les étudiants français qui s’y présentent ; le laboratoire de physique, d’après les déclarations de M. Leduc, n’est pas moins à l’étroit : que sera-ce, quand accourra ce grand flot des étudiants étrangers ? Nos maîtres s’estiment hors d’état de les recevoir.

Tout ce que j’ai dit de l’insuffisance des laboratoires du Collège de France et du Muséum, de leur défaut d’outillage, de leur dotation ridicule, du manque de personnel auxiliaire, s’applique aux services d’investigation de la Sorbonne. Son laboratoire de physiologie n’a pas de salle d’opérations aseptique ; son laboratoire de zoologie ne dispose ni d’abri pour les animaux, ni d’aquarium ; son laboratoire des êtres organisés, où Giard accomplit ses travaux justement réputés, est hors de la Sorbonne même, dans l’atelier en ruines où Soufflot travaillait du temps qu’il édifiait le Panthéon. Tous ces laboratoires, comme ceux de chimie minérale, de chimie physique, n’ont qu’un outillage incomplet ; les préparateurs y sont rares, les garçons de laboratoire trop peu nombreux. Quant aux crédits, ils couvrent les frais de combustible et d’électricité, mais non les achats d’instruments et de produits nécessaires aux recherches. Comment les maîtres de la Sorbonne ont-ils pu, durant la guerre, seconder la fabrication des explosifs, fournir (dans un seul service) 14 000 appareils d’écoute souterraine de types divers et des appareils pour l’écoute sous-marine et l’écoute d’avions, donner sous maintes autres formes le plus précieux concours à la défense nationale ? Parce que les ministères de la Guerre et de l’Armement leur allouèrent des crédits élevés et leur permirent ainsi de monter des ateliers, de faire travailler à l’extérieur des chercheurs et des mécaniciens. Que vont devenir ces entreprises dont les résultats dépassèrent toute attente ?