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qu’elle fasse marcher de pair la recherche et l’enseignement, et qu’elle maintienne l’inventeur dans le professeur ; il faut qu’elle suscite des vocations et leur donne les moyens de se produire, qu’elle assure un recrutement de savants et un outillage scientifique. Bref, l’une de ses missions étant de créer la science, elle doit se développer, fût-ce en dehors de ses cadres rigides, pour être en mesure d’accomplir cette œuvre royale.

Par quelles voies et par quels moyens, je ne prétends pas l’indiquer en détail. Je me fie à la sagesse de l’Université elle-même. Il faut la consulter. Ce qui est bien arrêté dans mon esprit, c’est qu’il faut s’adresser aux savants et aux professeurs, à tous les esprits directement intéressés à la réforme, établir avec eux un questionnaire et coordonner leurs réponses.

Comment procurer aux étudiants les mieux doués des postes d’attente qui leur permettent de faire l’épreuve de leurs talents ? Quel mode de recrutement adopter, afin d’obtenir des maîtres aptes à la recherche en même temps qu’à l’enseignement ? Quels moyens de travail et d’investigation assurer aux jeunes agrégés et maîtres de conférences ? L’État a-t-il le souci de stimuler le zèle scientifique des professeurs et de récompenser leurs découvertes ? Que valent les laboratoires de nos Facultés ? Vers quelle organisation nouvelle de la recherche et de l’enseignement nos Universités s’orientent-elles ? Voilà des points essentiels. Et là-dessus mon enquête apporte des éclaircissements et de précieuses précisions. Dans ce travail nécessairement impersonnel, je n’ai rien mis de moi qu’une ardente curiosité et mon zèle pour la patrie. Puissé-je avoir clairement groupé des faits exacts propres à nous orienter vers la reconstitution intellectuelle de la France !


I. — MAÎTRES ET ÉTUDIANTS


COMMENT FORMER DES VOCATIONS SCIENTIFIQUES PARMI LA JEUNESSE FRANÇAISE DÉCIMÉE

Voici une première question (la question préalable), émouvante et troublante. Les jeunes générations françaises qui se destinaient aux carrières intellectuelles ont été, comme les autres, terriblement décimées. Où l’Université pourra-t-elle lever un nombre suffisant de recrues, pour les former au travail