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dans vingt-six Etats souverains. Et puis, après la chute des dynasties, après les réformes introduites par la nouvelle constitution, reste-t-il encore aux Etats assez de vie pour subsister dans leur forme indépendante d’autrefois ? j’en doute fort. Il faut savoir prendre une décision et s’y tenir, même lorsqu’on a dû, pour s’y résoudre, surmonter certaines répugnances. Il semble bien qu’aujourd’hui l’Allemagne ne puisse attendre son salut que de son unité. Les revendications du Hanovre, celles de la Westphalie se reproduiront indéfiniment. Vous voyez que, pour y couper court, beaucoup de Prussiens, bien que très attachés à l’unité de la Prusse, se déclarent prêts à la sacrifier.

« Ce qu’on peut reprocher à la Constitution, c’est précisément qu’elle laisse subsister dans le Reich des Etats particuliers qui n’ont plus assez de force pour vivre, et qui en ont encore trop pour mourir. Mieux vaudrait, à mon avis, renoncer franchement au système fédéral, et instituer un régime unitaire, avec la division de l’Allemagne en provinces. On assurerait à chaque province une autonomie compatible avec l’unité de l’Empire et nécessitée par les caractères différents et les intérêts particuliers des diverses régions. La Prusse, à elle seule, ne formerait pas moins de sept provinces, mais pas plus de neuf. Cette solution comporte des inconvénients ; mais les circonstances présentes l’ont peut-être rendue nécessaire. »

M. Heinze passe en revue les détails de la réforme centralisatrice, et conclut cet examen en déclarant que l’unification des chemins de fer et celle des finances seront tout à l’avantage de la nation allemande. Chemin faisant, il m’a expliqué pourquoi l’impôt sur le revenu ne pouvait être qu’un impôt d’Empire : les conditions d’existence, les charges locales sont si différentes d’une région à l’autre, d’une ville à l’autre de la même région, que tout autre système entraînerait des inégalités flagrantes, et, par suite, des déplacements de population qu’il convenait d’éviter.

M. Heinze ne critique pas trop sévèrement les projets fiscaux d’Erzberger. Lui aussi invoque la nécessité comme circonstance atténuante. « Le régime fiscal proposé par le gouvernement est injuste : cela n’est pas douteux. Mais certaines injustices sont nécessaires, et il faut savoir s’y résoudre. Mes amis et moi ne nous faisons aucune illusion sur le double caractère des nouveaux impôts : ils sont destinés tout ensemble