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dépassait une certaine intensité. Alors, il s’est ingénié à trouver un moyen de reprendre au plus tôt le terrain qu’il ne pouvait pas ne pas perdre, et il a imaginé son système des « divisions d’intervention. » Ce sont des divisions placées à une certaine distance en arrière de la zone présumée des attaques ennemies, protégées par leur distance même contre la majorité des canons, et qui tombent par surprise sur l’assaillant lancé à corps perdu et affaibli, tout au moins désorganisé, par son succès même.

Mais le système n’est bon que si cet assaillant pousse à fond, toujours plus loin à l’intérieur des positions allemandes. S’il s’arrête dans son élan, s’il reste sous la protection de ses canons, s’il se contente, en d’autres termes, de limiter son gain à la portée de son artillerie, les divisions d’intervention ou n’interviennent pas ou n’interviennent que pour venir mourir sous l’avalanche d’obus déchaînée contre elles, en avant de la nouvelle position occupée par l’ennemi.

Ludendorff en fait l’aveu : « L’ennemi s’était adapté à notre tactique des divisions d’intervention. Les attaques à objectifs éloignés comme celle entreprise par le général Nivelle lors de la bataille d’Aisne-Champagne, n’étaient plus de mise chez lui. Il savait le secret de notre contre-attaque et agissait en conséquence, en fixant une certaine limite à l’exploitation de son succès. »


Le procédé étant éventé, Ludendorff songea à créer une zone avancée, très faiblement tenue, et à reporter plus en arrière la véritable défense. Nous verrons que, de l’autre coté des fils de fer, on était arrivé à la même conclusion.

Dans l’offensive contre une position fortifiée, tout son art a consisté à amener par surprise une puissante masse d’attaque en face du front à emporter, en une préparation d’artillerie aussi puissante que brève, puis en un assaut poussé à la course, jusqu’à bout de souffle. En arrière des divisions de première ligne, d’autres suivaient, pour les remplacements.

La méthode a obtenu les succès que l’on connaît, mais la parade n’a pas tardé avenir. Puisque les défenseurs de la première position pouvaient difficilement résister, même s’ils étaient prévenus de l’imminence de l’assaut, on les supprima ou à peu près. Il ne resta, dans les premières lignes, que quelques