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intrigues suscitées par sa royale investiture ; on ne les connaît pas toutes, certes ! Elles furent ignorées de la plupart des contemporains ; mais le temps en a démasqué quelques-unes. Il faut d’abord poser en principe que nous ne savons encore presque rien des « dessous de la Révolution ; » ceux qui nous l’enseignent l’ont trop souvent réduite à l’étroite mesure de nos préventions ou de leur partialité ; elle fut bien différente de ce qu’ils nous la montrent et si quelque Robespierre, quelque Barras ou quelque Fouché, revenait par miracle, nous la raconter sans réticence ni omission, leur récit paraîtrait absurde aux professeurs officiels qui ont pris à tâche de nous endoctriner. Or, « rien, a priori, n’est absurde dans cette terrible histoire de la Terreur, si mystérieuse par tant de côtés » écrit un érudit, bien informé et qui ne passe pas pour se plaire au romanesque. En appliquant ce sage précepte à la captivité du Dauphin, on reconnaîtra peut-être qu’elle ne fut point un simple épisode du grand drame révolutionnaire, mais qu’elle en forma le fond et la contexture, à l’insu même de ceux auxquels étaient distribués les rôles.

Le 6 avril 1793, la « Convention décrétait la création d’un comité de neuf membres chargés de concentrer tous les pouvoirs et de donner l’impulsion au Conseil exécutif. La chose n’avait pas été votée sans oppositions et l’une des plus prophétiques fut celle de Biroteau disant : — « N’est-il pas permis à un ami de la liberté de craindre qu’il ne s’élève dans ce comité un ambitieux qui, sous le masque du patriotisme, usurpe le pouvoir suprême ? » Le décret constitutif ordonnait que les délibérations du nouveau comité seraient secrètes et consignées sur des registres. Les neuf se réunirent dès le lendemain, dimanche 7 avril ; ils décidèrent de tenir deux séances par jour, à neuf heures du matin et à sept heures du soir et « de n’admettre aucun citoyen pendant leurs discussions. » Ainsi naquit le Comité de Salut public. Parquet prodige se trouva-t-il un homme assez audacieux et assez adroit pour braver cette interdiction et s’insinuer en intrus, en habitué aux entretiens des redoutables commissaires ? C’est, parmi bien d’autres énigmes, l’une des plus déroutantes et des plus discutées.

Lorsque furent publiés, il y a vingt-cinq ans en Angleterre, sous la direction de Mr J. J. Cortwight, secrétaire de l’Historical manuscripts commission, les papiers de Lord Grenville,