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Ce qu’il y a de plus dangereux, c’est de se laisser adorer. Bénissons les critiques, ma Li nette ; nous n’avons rien à craindre (de ce genre) dans notre ménage ; on ne nous épargne pas les pierres ! J’ai reçu, à propos des Paysans, la plus enragée des lettres. J’en ai ri comme un fou. Je te la garde ; c’est un curieux monument de haine.

Allons, mille caresses et toutes mes tendresses. ! Mille. gracieusetés à ma petite Anna.


II


A Madame Hanska, Hôtel de Saxe, à Dresde.


(Passy,) 7 janvier (1845),

Mon ange, je ne t’ai écrit que deux lettres par Bassange. J’aime à croire que toutes celles adressées à l’hôtel de Saxe te sont parvenues, puisque tu as reçu le feuilleton (les Paysans). Il a dû venir en deux fois.

Voilà qui est bien convenu (car je te réponds à ta lettre du 31 décembre dernier, que j’ai reçue hier). Si tu l’as mise à la poste le 1er janvier, elle a mis cinq jours à venir ; mais elle perd un jour à Paris. Nous crions, à la Chambre, comme des diables, pour cette perte (de temps) que fait le transit des lettres à la grande poste.

Nous nous verrons à Francfort. Ta résolution me fait la plus vive joie, car je ne sais pas l’allemand, et je puis aller, en français, jusqu’à Francfort, et j’aurai mille services d’un excellent Rothschild qui est là, le meilleur de tous. De là, je pourrai travailler à peu près comme à Paris. Seulement, mon cher louloup, aie soin de me dire sur-le-champ où tu te logeras. Si tu voulais faire faire un contrat (de location) d’une maison particulière sans être trompée, je t’enverrais un mot pour ce Rothschild.

N’aie aucune inquiétude ni pour toi, ni pour Anna ; nous avons un temps doux et charmant depuis quinze jours, et, à mesure que tu iras vers le Rhin, tu trouveras (de plus en plus) une excellente température.

Le voyage n’est rien de Leipsick à Francfort. Les routes sont belles, et l’on va bien, sans aucun danger.