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Penaud, Guillot, garçon d’office, le laveur Adrien, Fontaine, aide de cuisine, l’argentier Mauduit, chargé aussi du garde-manger, et les trois garçons servants, Marchand, Chrétien et Turgy, qui s’étaient, ainsi qu’on l’a dit, introduits au Temple de leur propre initiative.

Le concierge de la Tour, tenant l’emploi d’économe, était Jean-François Mathey, âgé de vingt-huit ans : ses appointements étaient de 6 000 livres, et il avait sous ses ordres deux guichetiers, Risbey et Hochez, tous deux d’un extérieur repoussant, bonnet de poil en tête et grand sabre à la ceinture. « Quoiqu’ils fussent inutiles et souvent absents, » ils recevaient chacun 6 000 livres.

Un arrêté de la Commune obligeait tous les anciens serviteurs du Comte d’Artois à sortir du Temple : plusieurs parvinrent à éluder cette mesure et même à se faire employer à la garde ou au service des prisonniers : tels le domestique Gourlet, promu porte-clef, l’argentier Angot, nommé scieur de bois, Mancel, qui conserva ses fonctions de balayeur et Baron, ci-devant frotteur, qui devint gardien des scellés. La femme Rokenstrohe resta à la lingerie ; Darque, l’ancien bedeau, à la Conciergerie du Palais, et Picquet à celle des écuries. Il y avait en outre deux porteurs de bois, Hesse et Petit-Ruffon, un commissionnaire Quenel et un perruquier Danjout. Le père Lefebvre et la mère Mathieu continuèrent à tenir la buvette de la grande cour d’entrée. Tous ces gens circulaient nécessairement dans l’enceinte du Temple ; ils sortaient par la ville, rentraient à volonté, traversaient à leur gré le jardin parmi la foule des gardes nationaux composant la garnison quotidienne. Plusieurs pénétraient même dans la Tour suivant les exigences de leur service et approchaient la famille royale. Or, ils étaient, pour la plupart, par tradition, par intérêt ou par sentiment, portés à s’apitoyer sur le sort des prisonniers, encore que la crainte de perdre leur place les rendit prudents. Il est singulier que la Commune, si méticuleusement ombrageuse, ne prit pas le soin ni le temps de recruter, pour concourir à l’étroite surveillance qu’elle prétendait exercer, un personnel d’opinion plus conforme à ses desseins et moins suspect d’attachement au régime déchu.


G. LENOTRE.