Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/480

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chances d’être entendue. Nous ne serions pas étonnés si les élections avaient pour résultat de faire entrer dans la Chambre un personnel en partie nouveau, et si le programme du travail n’était dessiné qu’après le scrutin, au cours même de la législature. Le pays essaiera de rassembler des bonnes volontés et des compétences : il laissera ensuite aux nouveaux élus le soin de montrer s’ils sont capables d’accomplir la plus belle œuvre qui ait jamais été proposée à une Assemblée.


Il y a une question qui aura nécessairement elle aussi une grande influence sur les élections : c’est celle du traité de paix. Ratifié par quatre Puissances, libéré en Europe de toutes les discussions et formalités, le traité n’est pas encore entré en vigueur à l’heure où ces lignes sont écrites. Peut-être le sera-t-il au moment où elles paraîtront : nous le souhaitons vivement. Le retard du Conseil suprême, même s’il est méthodique, n’a que des inconvénients. Il est nécessaire que désormais tous les peuples aient le sentiment que le traité, malgré ses imperfections, a le mérite incontestable d’exister. Le Conseil suprême a d’abord pris son temps afin d’instituer toutes les commissions prévues et toutes les missions militaires : mais ce travail est près d’être achevé. A-t-il voulu attendre ensuite que le Sénat américain se soit prononcé ? Le calcul aurait été bien contestable. La discussion qui s’est poursuivie pendant plusieurs semaines en Amérique et qui a été prolongée par la maladie du président Wilson n’était pas une raison suffisante d’ajourner l’entrée en vigueur du traité. Bien au contraire : au moment où le Sénat américain s’abandonnait aux controverses et paraissait hésiter, les Alliés de l’ancien continent ayant achevé la ratification avaient intérêt à montrer que le traité si laborieusement édifié était déjà devenu pour eux une réalité. Les États-Unis auraient fort bien compris que les Alliés ne pouvaient pas attendre davantage et qu’en faisant entrer le traité en vigueur, ils se conformaient d’ailleurs au texte du document. Sans doute il aurait été regrettable que les États-Unis ne fussent pas à même d’intervenir tout de suite dans l’exécution du traité à l’élaboration duquel ils ont pris une part prépondérante. Leur place aurait été réservée dans les commissions et au Conseil exécutif de la Ligue des Nations qui auraient pu commencer de fonctionner. Les nouvelles qui viennent d’Amérique permettent d’ailleurs de penser que la discussion ne sera plus bien longue et que les Alliés, ayant mis le traité en vigueur, n’auraient pas tardé à voir arriver les représentants