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que mes peuples ont montré dans les différents siècles. J’ai réfléchi à ce qui a été fait aux différentes époques de notre histoire. J’y penserai encore. »

La leçon porte droit sur le préfet de Paris, le comte Frochot ; mais l’Empereur, par la seconde partie de son discours, annonce de grandes mesures qu’il compte prendre pour affermir la dynastie.

A la vérité, à entendre ce qu’il dit au Conseil d’Etat, la dynastie n’a guère besoin d’être affermie : « Si le peuple, dit-il, montre tant d’amour pour mon fils, c’est qu’il est convaincu par sentiment des bienfaits de la monarchie. » Et tout de suite il ajoute, sans qu’on voie le rapport immédiat avec la question dynastique ni avec l’attentat de Malet : « C’est à l’idéologie, à cette ténébreuse métaphysique, qui, en recherchant avec subtilité les causes premières, veut sur ses bases fonder la législation des peuples, au lieu d’approprier les lois à la connaissance du cœur humain, et aux leçons de l’histoire, qu’il faut attribuer tous les malheurs qu’a éprouvés notre belle France. Ces erreurs devaient, et ont effectivement amené le régime des hommes de sang. En effet, qui a proclamé le principe d’insurrection comme un devoir ? qui a adulé le peuple en le proclamant à une souveraineté qu’il était incapable d’exercer ? Qui a détruit la sainteté et le respect des lois en les faisant dépendre, non des principes sacrés de la justice, de la nature des choses et de la justice civile, mais seulement de la volonté d’une assemblée d’hommes étrangers à la connaissance des lois civiles, criminelles, administratives, politiques et militaires ? Lorsqu’on est appelé à régénérer un Etat, ce sont des principes constamment opposés qu’il faut suivre. L’histoire peint le cœur humain. C’est dans l’histoire qu’il faut chercher les avantages et les inconvénients des différentes législations. Voilà les principes que le Conseil d’État d’un grand Empire ne doit jamais perdre de vue. Il doit y joindre un courage à toute épreuve, et, à l’exemple des présidents Harlay et Mole, être prêt à périr en défendant le Souverain, le Trône et les Lois. » Ce dernier paragraphe est pour Frochot, mais pour qui, le corps du discours et la charge contre les idéologues ? N’est-on pas en droit de penser que l’Empereur persiste à suivre la fausse piste sur laquelle il est parti ? N’avait-il pas, à la première nouvelle de l’attentat, pensé à faire