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« son cher Malet. » De plus, toutes les mesures ayant pour objet de rompre les liens entre la police civile et la militaire, avaient été prises par lui ; seul il pouvait connaître l’imbécillité de Soulier, l’extrême médiocrité de son corps d’officiers, l’état d’insubordination de la Garde de Paris, où une délibération des sous-officiers avait bien plutôt décidé les mouvements de la troupe, qu’un ordre du colonel. Aussi chercha-t-il à faire oublier ces fautes de conduite, par des excès de zèle hors de la hiérarchie, comme de prendre l’initiative, sans l’avis de Cambacérès, d’expédier à l’Empereur, un de ses aides de camp, avec un récit qu’on pouvait bien dire arrangé de l’événement, et aussi par d’immédiates et d’extraordinaires sanctions de crimes qui n’étaient au plus que des fautes, — quand il y avait des fautes.

Non seulement il a fait arrêter le colonel Rabbe, de la Garde de Paris, « dont les réponses ne l’ont pas satisfait » et dont « la conduite lui a paru celle d’un homme qui s’est préparé pour tous les événements ; » avec lui, le capitaine Borderieux, du même régiment, et l’adjudant-major, mais il a fait arrêter aussi le chef de bataillon Chery, commandant la 11e cohorte à la caserne de Babylone, qui n’a participé à rien et n’a rien su, et il a enlevé le commandement des dragons de la Garde de Paris, au colonel Goujet, contre lequel ne s’élève pas le moindre soupçon. Il entend arrêter tout le monde, et substituant son autorité à celle de Savary, il donne des ordres à tort et à travers. Quoiqu’il sache à merveille qu’il ne s’est rien passé à Saint-Cloud, quoique le maréchal des logis des dragons de Paris, envoyé par son aide de camp, ait rendu bon compte que tout dormait à son arrivée, il a fait monter à cheval toute la cavalerie de la Garde Impériale, et l’a fait se porter aux grandes allures sur le palais, pour la défense de la dynastie.

Malgré ce que Savary lui a dit, et lui a prouvé, il ne peut admettre que Malet ait joué, sous le nom de Lamotte, les premiers actes de son drame. Un malheureux général Lamotte a eu la fâcheuse idée de venir à Paris, et il est descendu rue de l’Université, dans l’hôtel où habite Mme Malet. C’est assez pour l’incriminer. Il a produit un. alibi incontestable et que Savary a reconnu exact ; mais, lui écrit Clarke, « je crois indispensable d’arrêter sur-le-champ M. le général Lamotte, et j’en vais donner l’ordre. J’ai vu sa lettre à Votre Excellence, mais ses assertions ne peuvent me déterminer à le croire innocent sur